UN ÉTÉ UN PEU TROP SEC
NDLR : Ce texte a été mis sous presse le 20 juillet et ne tient pas compte de précipitations qui pourraient être survenues au cours des derniers jours.
Il fait beau, il fait chaud. Pour plusieurs, c’est l’été idéal. Mais pas pour les agriculteurs qui subissent des pertes de production en raison de la sécheresse qui sévit depuis plusieurs semaines maintenant.
La situation est problématique dans les champs de la région, comme ailleurs en Ontario et au Québec. Les dernières semaines ont été pénibles pour les cultures. L’absence de pluie et les chaleurs intenses pendant plusieurs semaines créent une sécheresse rarement connue chez nous. Et cela a un impact majeur sur un très grand nombre de cultures et d’élevages.
« Comme on dit en bon canadien français, c’est sec. Cette semaine je suis allé faire un tour d’automobile dans la région de SaintAlbert, Casselman et Saint-Isidore, et on voit que le dommage est déjà fait », a témoigné Réjean Pommainville, producteur de grandes cultures et directeur représentant Stormont, Glengarry, Prescott et Russell au sein de la Fédération de l’agriculture de l’Ontario.
Simon Durand, directeur exécutif de l’Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO), a aussi attesté que les champs sont secs et que les rendements ont diminué, notamment pour la deuxième coupe de foin. « Et les producteurs laitiers eux, ils ont besoin de foin. Là on a fait deux récoltes, et à la deuxième, il n’y en avait pas beaucoup (de foin). S’il ne pleut pas, il n’y aura pas de troisième et quatrième récolte », s’est inquiété M. Pommainville.
La situation est sérieuse un peu partout sur le territoire. C’est ce qu’a indiqué Jovan Dozet, conseiller en production végétale à la Coopérative agricole d’Embrun. Pour son travail, il parcourt régulièrement les champs des fermiers de la région, particulièrement dans le nord-ouest de l’Est ontarien.
« Je commence à voir des champs qui ont des pertes totales, dans le maïs surtout, et le soya aussi commence à mourir, carrément », a-t-il rapporté. Il a précisé que la situation peut être variable d’un endroit à l’autre, en raison du type de sol et de la quantité de précipitations reçue depuis le début de la saison.
M. Durand a rappelé que la région a connu une importante sécheresse en 2016, alors que la saison dernière avait été « très mouillée ». « Je n’ai pas vraiment de statistiques météo, mais c’est assez fort comme sécheresse cette année. Quand c’est le contraire et que c’est trop mouillé, les problèmes sont différents, mais ça donne les mêmes conséquences », a-t-il indiqué.
À ce moment-ci, il est difficile d’évaluer les conséquences de la sécheresse sur les récoltes et les différentes productions. « Ça dépend combien de temps cette sécheresse va durer », a informé M. Durand. Mais même s’il devait y avoir une augmentation des précipitations, a-t-il fait remarquer, plusieurs agriculteurs ont déjà subi des pertes.
« Cette année si on peut s’en sortir avec une récolte juste moyenne, je pense qu’on va pouvoir se compter chanceux. Si on pouvait avoir de la pluie dans les prochains jours – pas dans les prochaines semaines là, dans les prochains jours, parce que ça presse – ça ferait une grosse différence… », a souhaité Réjean Pommainville.
Même le maïs, pourtant reconnu comme une culture plus résistante, montre des signes de fatigue. Quand les feuilles se replient sur elles-mêmes, c’est le signe d’un manque d’eau. Selon John McCart, président du secteur Argenteuil à l’UPA Outaouais-Laurentides, les prochains jours seront cruciaux pour les cultures de maïs et les autres céréales, comme le soja.
Un enjeu pour les fruits et légumes aussi
Pour les producteurs maraîchers, l’ampleur des dégâts semble moindre pour le moment. « Ce sont des fermes qui ont souvent des systèmes d’irrigation. Ils peuvent se protéger contre la chaleur en arrosant leurs productions », a expliqué Simon Durand. C’est tout de même loin d’être la situation idéale. Le temps très chaud fait en sorte que l’eau s’évapore rapidement. Et pour certains, les bassins de rétention s’épuisent.
Jacques Lamoureux exploite Les Jardins Lamoureux à Vankleek Hill, une ferme mixte de fruits et de légumes. Au cours des dernières semaines, lui et ses employés ont dû arroser les champs de fraises, de framboises, de bleuets, de maïs et de haricots. L’eau provenait d’un étang sur la propriété qui est évacuée par un drain municipal, mais l’étang était en danger de se dessécher.
« Cela aurait été une catastrophe », a déclaré M. Lamoureux, ajoutant que l’étang était vide la nuit où l’orage a frappé. En plus de donner un saccage complet à toutes les récoltes, la pluie a rempli l’étang jusqu’à une profondeur de deux pieds avec de l’eau pour l’irrigation future. « Maintenant, nous avons besoin d’au moins 20 millimètres de pluie chaque semaine », a-t-il déclaré.
Les animaux aussi ont chaud
La sécheresse affecte aussi les animaux. Les producteurs laitiers doivent composer avec une baisse de production de leur bétail. « La canicule qu’on a eue est aussi dommageable que le manque d’eau, parce que ça met un stress plus élevé sur les plantes et sur les animaux », a affirmé M. Pommainville, qui est aussi un ancien producteur laitier.
Du côté des élevages, ce sont les coûts de production qui risquent d’augmenter et d’affecter les profits des producteurs. Comme les humains, les animaux sont moins portés à se nourrir lorsqu’il fait chaud. Ils mettent donc plus de temps à engraisser. Et la rareté du grain et du foin aura assurément un impact sur leur prix. Les gains sur investissements s’en verront donc affectés.
Prière de retirer les chapelets de la corde à linge
L’averse de pluie qu’il y a eue dans la nuit du 16 au 17 juillet a été bien accueillie par les agriculteurs locaux. Mais il en faut davantage. « Cette pluie était comme de l’argent à la banque », a déclaré Robert Kirby, propriétaire et exploitant d’une ferme mixte dans le canton d’Hawkesbury-Est.
M. Kirby, qui est un fermier à temps plein en plus d’être maire du canton, a noté que sa récolte de soja commençait à souffrir de la sécheresse prolongée qui dure depuis le mois de juin. « Dans certains endroits, il y aura des pertes. Les cultures auront besoin de plus de pluie à coup sûr », a-t-il indiqué.