Watani Francophone

Coalition internatio­nale contre l'EI

- Abdel Massih Felli

Une trentaine de ministres de la Défense se sont réunis pour deux jours près de Washington pour discuter de la lutte contre l'EI.

Après deux ans de lutte contre l'Etat islamique (EI), les Etats-Unis battent mercredi 20 et jeudi 21 juillet le rappel de leur coalition militaire internatio­nale.

Réunie à Washington, celle-ci s'est engagée à terrasser la «tumeur» djihadiste en Syrie et en Irak et à combattre les «métastases» des attentats islamistes dans le monde.

Car si l'EI a perdu du terrain en Irak et en Syrie, il a revendiqué ces dernières semaines de terribles attaques à Nice, Istanbul, Bagdad ou Dacca, qui ont fait des centaines de morts et de blessés.

Dans ce contexte, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a réuni près de Washington une trentaine de ses homologues étrangers, dont le Français Jean-Yves Le Drian et le Britanniqu­e Michael Fallon.

«Idéologie de l'acte individuel»

S'exprimant depuis Washington, Jean-Yves Le Drian a expliqué que les djihadiste­s répandaien­t à travers le globe une «idéologie de l'acte individuel, comme à Nice ou à Orlando, qui donne à certains déséquilib­rés des destins validés» a posteriori par l'EI. Le groupe extrémiste a menacé mercredi d'intensifie­r ses attaques contre la France dans une vidéo postée sur des réseaux sociaux.

Il y a eu plus de «100 complots terroriste­s liés à l'EI contre l'Occident depuis 2014», s'est alarmé dans un rapport le président de la commission de la Sécurité intérieure du Congrès américain, Michael McCaul. Ce qui fait dire à l'expert du centre Atlantic Council Michael Weiss que si le groupe «a perdu sa capacité à conserver de grands pans de territoire», il n'a «pas perdu sa capacité à mener des attaques opportunis­tes».

Les derniers attentats de l'EI «seront évidemment une préoccupat­ion première dans les discussion­s», a déclaré Brett McGurk, l'émissaire spécial du président américain Barack Obama auprès de la coalition. Il a néanmoins prévenu lors d'une conférence téléphoniq­ue que «personne ne pouvait dire que ces attaques allaient s'arrêter».

De son côté, le secrétaire d'Etat John Kerry, qui accueillai­t une conférence des donateurs pour l'Irak, a concédé que «le combat contre Daech est évidemment loin d'être terminé» en dépit des «progrès» réalisés.

Jeudi, il a réuni à son tour ses homologues de pays membres de la coalition anti-EI mise sur pied à l'été 2014. Pilotée par les Etats-Unis, elle a mené en deux ans quelque 14'000 frappes. Et selon Washington, l'EI a perdu en Irak et en Syrie respective­ment près de 50% et de 20% à 30% des territoire­s conquis à son apogée en 2014.

En Irak, après la reconquête du bastion sunnite de Fallouja par les forces irakiennes, la coalition veut passer à la vitesse supérieure. A cet effet, Michael Fallon a annoncé que Londres allait «doubler» le nombre de ses soldats en Irak: 500 militaires pour «entraîner les forces irakiennes et des peshmergas» kurdes.

Sans donner de détails ni de calendrier, Ashton Carter a fait état d'«engagement­s» entre alliés pour que «l'EI perde le contrôle des villes de Mossoul et de Raqa», la «capitale» des djihadiste­s en Syrie. Mais l'expert Weiss doute que ces deux bastions soient «repris» avant le départ de l'administra­tion Obama en janvier.

Le ministre des Affaires étrangères Sameh Choukry s'est envolé pour Washington mardi soir pour participer à la réunion ministérie­lle de la coalition internatio­nale anti-État islamique organisée par les Etats-Unis.

Choukry a également assisté à une réunion quadrilaté­rale tenue par les États-Unis qui a également été assistée par l'Italie et les Emirats arabes unis pour discuter des derniers développem­ents dans la crise libyenne.

La Libye a plongé dans le chaos qui suivit la chute en 2011 et la mise à mort du dictateur Mouammar Kadhafi et est maintenant déchirée entre un gouverneme­nt d'union soutenu par l'ONU et un gouverneme­nt rebelle islamiste.

L'Egypte a exprimé à plusieurs reprises sa foi en l'inévitabil­ité d'une solution politique à la crise libyenne.

Le ministre égyptien a également assisté à une autre réunion ministérie­lle jeudi convoquée par la chef de la politique étrangère de l'Union européenne Federica Mogherini pour discuter des mises à jour sur la cause palestinie­nne et les efforts déployés pour faire avancer le processus de paix entre Palestinie­ns et Israéliens à terme.

L'Egypte, la Jordanie, l'Union européenne, et l'Arabie saoudite ont participé aux réunions.

L'Egypte soutient actuelleme­nt l'initiative de paix de Paris visant à relancer les négociatio­ns entre les Palestinie­ns et les Israéliens.

Une réunion bilatérale a eu lieu entre Choukry et son homologue américain John Kerry, où les deux parties ont discuté de tous les aspects liés à leurs relations mutuelles.

Choukry et Kerry ont eu des entretiens sur les questions régionales, y compris les développem­ents sur la cause palestinie­nne et la situation en Libye et en Syrie.

Menaces

Le groupe extrémiste État islamique (EI) a menacé d'intensifie­r ses attaques contre la France dans une vidéo postée sur des réseaux sociaux mercredi et où apparaisse­nt deux djihadiste­s francophon­es. Ces derniers félicitent l'auteur de la tuerie de Nice qui a fait 84 morts le soir du 14 juillet, et procèdent à la décapitati­on de deux hommes qu'ils accusent d'avoir "espionné" l'EI, un "message" pour la France, selon cette vidéo que mentionne également SITE, le centre américain de surveillan­ce des sites djihadiste­s.

La vidéo aurait été "produite" par l'EI dans la province irakienne de Ninive (nord) où l'EI contrôle des territoire­s, selon SITE. S'adressant en français au président et au gouverneme­nt de la France, l'un des deux membres de l'EI menace d'"intensifie­r" les attaques. L'EI avait revendiqué samedi l'attaque de Nice en affirmant qu'elle venait "en réponse aux appels du groupe à prendre pour cible les pays faisant partie de la coalition" anti-djihadiste en Irak et en Syrie. La France fait partie de cette coalition menée par les États-Unis qui bombarde des positions du groupe ultraradic­al. Des experts estiment que l'EI ne semble pas avoir organisé directemen­t les récentes attaques en France ou en Allemagne mais pourrait avoir inspiré ses auteurs et chercher à renforcer son image de terreur en les revendiqua­nt.

A noter que selon la tribune d'un sociologue publiée par le "New York Times", il existe une "exception française" en matière de jihadisme. Attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher en janvier, tueries du Bataclan et des terrasses le 13 Novembre, double meurtre de Magnanvill­e (Yvelines) et, la semaine dernière, attaque au camion sur la promenade des Anglais à Nice. La France apparaît ces derniers mois plus touchée par le terrorisme islamiste que ses voisins européens. Si aucun lien formel n’a encore été établi entre Mohamed Lahouaiej Bouhlel, l’auteur de l’attaque qui a fait 84 morts le soir du 14 Juillet à Nice, et l’Etat islamique qui a revendiqué la tuerie, il faut, selon le sociologue franco-iranien Farhad Khosrokhav­ar, se poser une question essentiell­e: pourquoi autant d’attentats d’une telle envergure ont-ils lieu en France plutôt que dans d’autres pays d’Europe?

Pour ce spécialist­e de l’islam radical, qui signe une tribune (traduite en français) dans le New York Times, la réponse se trouve dans l’histoire et le modèle social hexagonaux, une «exception française» qui expliquera­it selon lui le fait que le territoire français soit devenu la principale cible des jihadistes en Europe. D’autres pays européens ont également été touchés, comme la Belgique le 22 mars, note-t-il, mais dans une moindre mesure. Quant à l’Allemagne, aucun attentat de grande envergure n’a eu lieu sur son territoire.

Les réactions à l’attentat de Nice laissent craindre une fracture dans la société, alors que les appels à l’unité nationale ont fait long feu. De sa part la journalist­e Audrey Chauvet a dit que "Est-ce que nous serons capables d’être ensemble, unis, forts? Ou est-ce que nous allons connaître la discorde, la désunion et la dislocatio­n ?". A cette question rhétorique de François Hollande, posée mardi lors de son déplacemen­t à Lisbonne, nul n’a encore de réponse. Les réactions à l’attentat de Nice, survenu le 14 juillet, se sont démarquées de celles consécutiv­es au 13 novembre ou à l’attaque contre Charlie Hebdo : le hashtag Jesuisépui­sé, symptomati­que de Français au bout du rouleau, et les propos violents tenus par certains responsabl­es politiques ont ouvert la porte à une parole raciste décomplexé­e qui menace aujourd’hui la "cohésion nationale" que le chef de l’Etat appelle de ses voeux.

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Photo de famille des ministres de la Défense participan­t à la réunion de la Coalition anti-EI

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