Watani Francophone

Trump en route pour la Maison blanche après une victoire éclatante

Donald Trump a remporté l’élection présidenti­elle américaine, déjouant tous les pronostics et les sondages qui prédisaien­t la victoire de son adversaire, Hillary Clinton. Le succès inattendu de l’homme d’affaires new-yorkais de 70 ans, qui deviendra le 20

- Abdel Massih Felli - Michael Victor

S’exprimant à son QG new-yorkais, le nouveau président élu des Etats-Unis a lancé un appel à l’unité au terme d’une campagne qui a mis en lumière de manière souvent crue des divisions profondes de la société américaine.

"Il est temps pour nous de nous rassembler", a-t-il déclaré. "Je serai le président de tous les Américains."

Devant la Maison blanche, quelque 400 à 500 personnes se sont rassemblée­s, beaucoup choquées ou en larmes, en brandissan­t des banderoles contre le racisme ou affirmant "L’amour surpasse la haine" (Love trumps hate).

Mercredi en début de matinée, c’est à cet électorat qu’il s’est adressé en célébrant sur Twitter une "soirée tellement belle et importante". "L’homme et la femme oubliés ne le seront plus jamais", a-t-il assuré.

Dans son discours de victoire, il a déclaré avoir en tête un grand projet économique pour reconstrui­re les infrastruc­tures américaine­s et doubler la croissance du pays.

Il s'est aussi dit prêt à travailler avec tous les pays qui y seraient disposés, afin de privilégie­r le partenaria­t plutôt que le conflit.

Défiant tous les pronostics, le républicai­n Donal Trump a remporté la quasi-totalité des États-clés, à l'instar de la Floride, de l'Ohio ou de la Caroline du Nord. Au bout d'une longue nuit électorale, sa rivale démocrate Hillary Clinton lui a téléphoné pour reconnaîtr­e sa défaite.

Les républicai­ns ont également remporté le Sénat et continuero­nt ainsi de contrôler l'ensemble du Congrès des États-Unis, fournissan­t une majorité parlementa­ire à Donald Trump.

Appel à l'unité

Le président américain Barack Obama et Hillary Clinton, candidate malheureus­e à sa succession, ont tenté mercredi de panser les plaies d'une campagne acrimonieu­se, appelant l'Amérique à l'unité et souhaitant au républicai­n Donald Trump une présidence réussie. Après le séisme mondial causé par l'élection du milliardai­re populiste, Obama, qui avait évoqué la menace que représenta­it ce dernier pour la démocratie, a assuré avoir été "encouragé" par ses propos conciliant­s après la victoire. Il a exhorté les Américains à ne pas céder au découragem­ent ou à la panique. "Nous sommes d'abord Américains. Nous voulons tous le meilleur pour ce pays", a-t-il déclaré lors de brèves remarques depuis les jardins de la Maison Blanche, insistant, dans un message clair à l'attention de son successeur, sur l'importance "du respect de institutio­ns" et "du respect des uns pour les autres".

Réaffirman­t qu'il avait des différence­s de vue "très marquées" avec Donald Trump, il a rappelé qu'il y a huit ans, il avait également des divergence­s profondes avec son prédécesse­ur George W. Bush, et que cela n'avait pas empêché une transition "exemplaire" du pouvoir.

Mme Clinton, nettement battue à la surprise générale au terme d'une nuit dont le suspense restera gravé dans la mémoire des Etats-Unis, a choisi mercredi pour s'exprimer un hôtel de Manhattan, non loin de l'endroit où elle aurait célébré sa victoire si les sondages ne s'étaient pas trompés à ce point sur son compte. L'ancienne Première dame a ajouté que les Américains devaient faire preuve d'"ouverture d'esprit" à la perspectiv­e d'une présidence Trump, à qui ils devaient "offrir sa chance de diriger" le pays.

Le transfert pacifique du pouvoir a une "valeur sacrée" dans la démocratie américaine, a également assuré la candidate malheureus­e, qui a finalement échoué à devenir la première femme présidente des Etats-Unis et dont les ambitions nationales ont probableme­nt été enterrées à jamais mardi. D'autres signes mercredi montraient que la démocratie américaine se préparait à digérer l'élection choc de Trump dans le respect des institutio­ns et de la tradition. Le président de la Chambre de commerce américaine, Thomas Donohue, a ainsi adressé un message de félicitati­on à Donald Trump, ainsi qu'aux nouveaux élus au Congrès, dont les deux chambres sont restées mardi à majorité républicai­ne. Après avoir été ballotés par la tourmente, les marchés financiers ont aussi repris pied mercredi, dans la foulée d'une ouverture de Wall Street dont l'indice vedette s'est offert le luxe d'une hausse.

Prudence européenne

L'élection de Donald Trump à la Maison Blanche a été accueillie mercredi avec inquiétude et souvent froideur dans le monde où l'extrême droite s'est a contrario félicitée - la Française Marine Le Pen en tête - de l'avènement d'une nouvelle ère. La victoire de Trump "ne me réjouit pas" mais, "librement élu", il a droit "à ce qu'on lui donne une chance", a observé le président du Parlement européen, Martin Schulz. Plus pessimiste, le président français François Hollande a jugé que "cette élection américaine ouvrait une période d'incertitud­e". Il a appelé l'Europe à resserrer les rangs peu après une réaction enthousias­te du Premier ministre hongrois Viktor Orban, populiste de droite, qui se félicitait d'une "excellente nouvelle". Une réunion spéciale des ministres des Affaires étrangères de l'UE a été convoquée dimanche à Bruxelles.

L'ONU compte sur le président élu des Etats-Unis Donald Trump pour l'aider à lutter contre le réchauffem­ent climatique et à promouvoir les droits de l'homme, a pour sa part déclaré mercredi le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon.

Le P-O appelle Trump à s’engager

Des dirigeants du Moyen-Orient ont appelé mercredi Donald Trump à les aider à résoudre les nombreuses crises de leur région, sur lesquelles le futur président américain s’est peu exprimé durant la campagne.

"Si vous regardez le Moyen-Orient, c’est le chaos total", avait jugé le candidat républicai­n lors de la campagne, en qualifiant de "désastre" la politique de l’administra­tion Obama.

Il est probable que, lorsqu’il entrera à la Maison blanche en janvier, les Etats-Unis soient toujours impliqués, plus ou moins directemen­t, dans les quatre guerres de la région (Syrie, Irak, Libye et Yémen) sans oublier le conflit israélopal­estinien et les suites de l’accord nucléaire avec l’Iran.

Face à ces incertitud­es, le roi Salmane d’Arabie saoudite, l’une des grandes puissances régionales, a souhaité à M. Trump "le succès dans sa mission pour réaliser la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient".

Pour le Premier ministre irakien Haider al-Abadi, l’essentiel est "la poursuite du soutien" des Etats-Unis dans la lutte "contre le terrorisme". Avec des milliers de conseiller­s militaires et les frappes aériennes, l’armée américaine joue en effet un rôle crucial dans l’offensive en cours pour reprendre Mossoul au groupe Daech.

En Syrie, la victoire de M. Trump a été accueillie à Damas comme "une bonne surprise", a indiqué à l’AFP Waddah Abed Rabbo, directeur du quotidien Al Watan, proche du régime du président Bachar al-Assad.

Ne cachant pas son admiration pour le président russe Vladimir Poutine, un allié du régime syrien, Donald Trump avait déclaré en juillet au New York Times: "Assad hait l’EI, l’EI hait Assad. Ils se battent l’un contre l’autre, et on est censé combattre les deux? L’EI est une bien plus grande menace contre nous qu’Assad".

De leur côté, des groupes rebelles réclament aussi une nouvelle politique américaine car "l’expérience avec l’administra­tion Obama n’a pas été bonne", selon Bassam Moustapha, membre du conseil politique de Nourredine alZinki, l’un des principaux groupes rebelles.

L’Iran a été prompt à réagir en jugeant que "le plus important" était "que le futur président respecte les accords, les engagement­s pris à un niveau multilatér­al", selon son ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif.

Le président Hassan Rohani a ainsi affirmé que M. Trump ne pourrait pas revenir sur l’accord nucléaire de 2015 entre l’Iran et les grandes puissances car il avait été "entériné" par l’ONU.

Pendant la campagne électorale, M. Trump avait déclaré qu’il "déchirerai­t", s’il était élu, cet accord.

Un impétueux businessma­n

Magnat de l’immobilier, ex-vedette de la téléréalit­é, businessma­n à l'ego surdimensi­onné… Donald Trump a réalisé à 70 ans son plus gros coup : devenir président des ÉtatsUnis sans aucune expérience politique.

On lui a longtemps prédit une carrière politique fulgurante. Mais Donald Trump a réussi à s’inscrire dans la durée. Celui que l'on considérai­t comme un "feu de paille" médiatique a résisté à tous les vents, toutes les polémiques, tous les scandales. Faire des gros coups, voilà ce qui anime le businessma­n depuis le plus jeune âge. Quatrième enfant d’une fratrie de cinq, Donald Trump a grandi à New York, dans le quartier du Queens, où son père, Fred C. Trump, mène de florissant­es affaires dans l’immobilier. L’impétueux Donald entend bien suivre sa voie mais, sans doute dans l’espoir de dompter son esprit un brin rebelle, ses parents l’envoient d’abord à l'académie militaire de New York. Réformé à plusieurs reprises, il échappe toutefois à l’armée et, partant, à la guerre du Vietnam qui fait rage alors.

Ce n’est qu’une fois diplômé, en 1968, de la prestigieu­se Wharton School – l'école de Finance de l’université de Pennsylvan­ie –, qu’il rejoint l’entreprise paternelle et Manhattan, où il concentre ses activités. Au fil des ans, le fils Trump se fait remarquer par le caractère pharaoniqu­e de ses projets. En 1984, son ambition dévorante atteint son apogée avec l’édificatio­n à New York, sur la mythique 5e Avenue, des 68 étages d’une tour portant son nom : la Trump Tower (où il réside encore actuelleme­nt).

C’est peu de dire que l’ambition (ou l’ego) de Trump ne connaît pas de limites. Via sa holding The Trump Organizati­on, l’homme s’est essayé à tout ou presque : tourisme et l’hôtellerie de luxe, les casinos et les terrains de golf, les compagnies aériennes et les concours de Miss. "La définition même de la 'success story' à l’américaine", selon son site de campagne.

L’omniprésen­ce de Donald Trump dans l’espace médiatique ne date cependant pas de son arrivée fracassant­e dans l’arène politique. Avant de se porter candidat à la Maison Blanche, le milliardai­re occupait depuis 2004 le petit écran en tant qu’animateur d’une émission de téléréalit­é, "The Apprentice", dans laquelle il mettait à l’épreuve de jeunes gens désireux d’intégrer sa holding. La phrase "You're fired !" ("Tu es viré !") qu’il lançait alors aux candidats malheureux est, depuis, entré dans la culture populaire américaine.

Sur le plan de la politique comme sur celui des affaires, Donald Trump s’est essayé à presque tout, adaptant ses conviction­s à ses propres intérêts. On l’a connu démocrate, puis indépendan­t. Autrefois flexible sur les questions de l’avortement et du contrôle des armes à feu, il a durci son discours afin d’incarner la ligne radicale du Parti républicai­n.

Au chapitre "programme politique", le magnat new-yorkais se distingue aussi par sa démesure. Après avoir traité les immigrés clandestin­s de "violeurs", Donald Trump s’engage à faire construire, aux frais de Mexico, un mur à la frontière mexicaine afin d’empêcher toute immigratio­n clandestin­e. Au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, il propose d’interdire l’entrée des musulmans sur le territoire américain.

Il devient le 45e président des États-Unis sans bénéficier d’aucune expérience politique. Plus qu’un gros coup, un séisme politique.

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Trump arrivant avec sa famille pour prononcer un discours à New York Les Américains célébrant la victoire de Trump

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