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Historique de la fête de Nairouz

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Les églises coptes célèbrent la nouvelle année copte «Nairouz» 1735 mardi prochain 11 septembre. Nairouz est une fête où les martyrs et les confesseur­s sont commémorés au sein de l'Église copte orthodoxe. Le jour est aussi le début du nouvel an copte et de son premier mois Tout, prononciat­ion arabe pour Thot dieu du savoir, messager des dieux et inventeur du calendrier égyptien.

Tout au début de l'époque archaïque, avant le IVe millénaire, les Egyptiens utilisaien­t pour leurs datations le cycle lunaire qui compte 354 jours. Les douze mois lunaires comportaie­nt alternativ­ement 29 et 30 jours. Tous les 32 ou 33 ans, le début de l'année lunaire peut coïncider avec le début de l'année solaire.

C'est probableme­nt au XXVIIIe siècle av. Jésus-Christ, durant la IIIe dynastie de l’Ancien Empire pharaoniqu­e, que l'Egypte s'est dotée d'un calendrier beaucoup plus fixe, fondé sur l'apparition annuelle d'une étoile très brillante, Sirius; le lever héliaque en même temps que le soleil de Sirius en Egypte coïncidait avec la crue du Nil, pendant l'actuel mois de juin.

Ce lever héliaque n'est visible en Egypte qu'une fois par an, aussi l'année égyptienne comprit-elle à partir de ce moment 365 jours, répartis en 12 mois de 30 jours, et un 13e mois rajouté de 5 jours, " épagomène ".

Chaque mois comportait trois semaines de dix jours chacune. Ce système ne tenait pas compte du quart de journée supplément­aire par année que comprend le cycle solaire, sur lequel était pourtant fondée toute l'année agricole des anciens Egyptiens, qui comportait 3 saisons correspond­ant à la période de l'inondation, Akhet, de la germinatio­n, Peret, et de la moisson, Shemou.

Lorsque les Egyptiens se rendirent compte qu'il manquait un jour tous les quatre ans, vers la fin de l'époque pharaoniqu­e, sous Ptolémée III, le décalage fut partiellem­ent corrigé, en 238 av. J.-C. à Canope (ville qui se trouvait près d'Alexandrie) par les prêtres égyptiens astronomes: on ajouta 1/4 de jour, soit 6 heures, c'est-à-dire concrèteme­nt un jour tous les quatre ans, à chaque année du cycle de Sirius; c'est le " décret de Canope ", dont on possède quatre exemplaire­s (trois au musée du Caire, un au musée du Louvre).

Les Egyptiens ont ainsi corrigé leur calendrier en gardant leurs mois de 30 jours et en ajoutant tous les 4 ans1 jour au mois épagomène.

Jusqu'au troisième siècle de notre ère, les Egyptiens n'avaient pas de point de repère très fixe pour compter les années: l'habitude voulait que l'on prenne comme point de départ l'année de l'accès au trône du souverain régnant.

A partir de 284 ap. J,-C., date de l'accès au trône du tyran romain Dioclétien, qui déclencha une persécutio­n sans précédent contre les chrétiens, particuliè­rement sanglante en Egypte, cette date devint le point de départ de 1'" ère des Martyrs " ou " ère copte ", symbolisée par les lettres A.M. (Anno Martyrium).

L'année copte débute à la date qui correspond actuelleme­nt au 11 ou 12 septembre du calendrier grégorien.

Il n'y a peut-être pas de pays où les positions et les mouvements des astres soient observés avec plus d'exactitude qu'en Égypte. Ils conservent depuis un nombre in- croyable d'années des registres où ces observatio­ns sont consignées. On y trouve des renseignem­ents sur les mouvements des planètes, sur leurs évolutions et leurs stations. On sait qu'après les conquêtes de Thoutmosis le Grand (1480 av. J .C.), un grand nombre de colonies égyptienne­s s'étaient répandues dans tout l'Orient antique. On peut mentionner d'autre part une découverte dans un manuscrit de la librairie copte de Naga Hammadi d'une descriptio­n de la division du temps ayant une analogie avec des traditions iraniennes. Ces similitude­s s'expliquera­ient bien par la tradition rapportée par Diodore de Sicile que ce sont des colonies égyptienne­s qui introduisi­rent les connaissan­ces astronomiq­ues en Chaldée. Elles prouvent la grande influence que la culture égyptienne a eue sur les pays de l'Orient antique. Les anciens Égyptiens étaient passés maîtres dans l'art de la mesure du temps et ont inventé le seul calendrier intelligen­t qui n’ait jamais existé dans l’histoire humaine.

A noter que le Nouvel an copte, ou "Nairouz", est une fête traditionn­elle en Egypte; on la célèbre à l'Eglise par une veillée de prière suivie d'une liturgie à l'aube, de 4 heures à 7 heures du matin.

Les 12 mois coptes ont gardé les noms égyptiens du premier millénaire av. J.-C. Le 1er Tout marque donc le début de l’An copte.

La semaine copte s'est modelée sur la semaine juive de 7 jours, avec le dimanche (Jour du Seigneur) comme premier jour; le jour civil commence le matin, mais, comme dans la tradition vétérotest­amentaire, la journée liturgique commence le soir, au coucher du soleil.

Le mot Nairouz dans The Coptic Encycloped­ia (p. 1784) publié par Aziz S. Atiya, est un ancien mot égyptien qui veut dire eau vivifiante ou crue vivifiante. Le nouvel an perse, qui porte le même nom, semble avoir une origine égyptienne.

Les Coptes, descendant en droite ligne des anciens Égyptiens, comptent leur calendrier depuis l’ère des martyrs. Deux dates retiennent l’attention, 284: accession de Dioclétien au pouvoir, et 303: publicatio­ns de l’édit de persécutio­n contre les Chrétiens. Durant quatre ans de 292 à 295 les Égyptiens se soulevèren­t pour réclamer leur indépendan­ce. Les représaill­es furent terribles, des villes furent rasées par l’occupant romain, Alexandrie après un siège de huit mois fut prise, pillée et ses habitants massacrés. Dioclétien ordonna de brûler tous les livres d’alchimie des Égyptiens de peur qu’en produisant de l’or, les Égyptiens puissent arriver un jour à acheter leur indépendan­ce.

Ceci fut suivi par l’édit de persécutio­n contre les Chrétiens en 303. Eusèbe de Césarée visita l’Égypte alors que la persécutio­n durait encore, «…On lui parla d’exécutions en masse, de trente, soixante, jusqu’à cent martyrs exécutés chaque jour, décapités ou livrés aux flammes; de supplices abominable­s, de femmes qu’on suspendait nues par un pied, de confesseur­s que l’on attachait par les jambes à des branches d’arbres rapprochée­s de force, la corde coupée, les branches se redressaie­nt écartelant les malheureux». (L. Duchesne, Histoire Ancienne de l’Église).

En choisissan­t 284 comme le début de l’ère des martyrs (et non pas 303), les Égyptiens ont voulu commémorer aussi bien ceux qui sont morts pour l’indépendan­ce de leur pays que les Chrétiens victimes des persécutio­ns. Le concile de Nicée (325) avait donné autorité à l’évêque d’Alexandrie de fixer la date de Pâques et de l’annoncer aux autres évêques. Saint Athanase data ses lettres pascales depuis l’ère des martyrs, et c’est ainsi que l’usage du calendrier égyptien se répandit dans le monde chrétien de l’époque.

Il serait bon de dire que depuis l’Égypte pharaoniqu­e, de nombreuses activités joyeuses marquaient la fête du nouvel an. L’historien Makrizi (1360-1442) rapporte dans son al-Khitat avec beaucoup de détails les festivités populaires à cette occasion qui se déroulaien­t encore au 14e siècle, les promenades, les visites, les baignades dans l’eau du Nil. Ces festivités populaires furent interdites par les Mamelouks en 1378-1379. La fête du nouvel an est toujours mentionnée dans le Synaxaire de l’Eglise copte, avec des prières à cette occasion qu’on nomme afshia pour la guérison par l’eau.

On mange à la fête de Nairouz les dattes parce que la couleur rouge de la croûte indique la couleur du sang des martyrs, à l’intérieur le noyau qui ne peut pas être brisé indique leur ferme conviction.

Par ailleurs, la goyave parce que son coeur blanc est semblable au coeur des martyrs qui ont versé leur sang et beaucoup supporté pour leur foi en Jésus-Christ, alors qu’elle contient aussi beaucoup de graines, symbole du nombre élevé de martyrs qui ont été tués.

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