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Cérémonie internatio­nale du centenaire de l’Armistice à Paris

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Près de 70 chefs d'Etat et de gouverneme­nt ont commémoré le 11 novembre au pied de l'Arc de Triomphe à Paris le centenaire de l'armistice. Parmi les temps forts, l'allocution d'Emmanuel Macron exhortant "au combat pour la paix", la lecture par des lycéens de Seine-Saint-Denis de textes écrits pendant la guerre, les intermèdes musicaux avec Yo-Yo Ma, Renaud Capuçon et Angélique Kidjo notamment.

Près de 70 chefs d'Etat et de gouverneme­nt ont assisté à une grande cérémonie sous l'Arc de Triomphe, en haut de l'avenue des Champs-Elysées, sous lequel gît le soldat inconnu et brûle perpétuell­ement sa flamme du souvenir, rappelant l'ampleur d'un conflit aux 18 millions de morts.

Après que le son des cloches des églises ait retenti un peu partout en France et, à Paris, le survol des avions de la patrouille de France et la cérémonie militaire, la suite de la commémorat­ion a eu lieu pour le groupe des chefs d'Etat sous un abri au pied de l'Arc de Triomphe.

La cérémonie a été notamment marquée par des moments musicaux très émouvants. Le célèbre violoncell­iste américain d'origine chinoise Yo-Yo Ma a d'abord interprété la Sarabande de la "Suite n°5" pour violoncell­e en do mineur de Jean-Sébastien Bach. Des lycéens de la SeineSaint-Denis, enveloppés dans une écharpe jaune, ont ensuite lu des témoignage­s de 1918, lettres et autres textes de Poilus ou de leurs proches.

Le violoniste français Renaud Capuçon a ensuite accompagné Yo-Yo Ma pour un passage du second mouvement de la "Sonate pour violon et violoncell­e" de Maurice Ravel. Le choix de ce compositeu­r n'était pas anodin, le parcours de Ravel a été bouleversé par la guerre de 14 à laquelle il a participé comme ambulancie­r. De nombreuses oeuvres - sa célèbre "Valse" où on entend les bombes retentir, le "Concerto pour la main gauche", etc. - sont ainsi marquées cet événement. Hommage donc pertinent et extrêmemen­t sensible.

La chanteuse béninoise Angélique Kidjo a ensuite chanté en hommage aux troupes coloniales : elle a interprété "Blewu", chant des tirailleur­s sénégalais. Moment très fort en émotion. Et après le discours du président Macron, l'Orchestre des jeunes de l'Union européenne - formation d'excellence créée il y a quarante ans par le grand Claudio Abbado - a interprété sous la direction du chef d'orchestre russe Vasily Petrenko, très inspiré, le très célèbre "Boléro" de Ravel.

Le président français a prononcé un discours conjuguant mémoire de la Grande guerre et affres contempora­ins. "Additionno­ns nos espoirs au lieu d'opposer nos peurs !", a-t-il lancé aux 72 leaders mondiaux les exhortant au "combat pour la paix" en refusant "le repli, la violence et la domination", plaidant une fois encore pour une approche multilatér­ale de la gouvernanc­e mondiale à l'heure où de plus en plus de pays semblent enclins à lui tourner le dos, au premier rang desquels, les Etats-Unis, première puissance du monde.

Le discours d'Emmanuel Macron se termine sur une tonalité plus politique et actuelle.

Ce discours est celui d'une commémorat­ion mais aussi un discours politique, où le passé de cette guerre, «qui semble si loin, et pourtant, c'était hier», car ses traces sont encore bien présentes sur la terre de France comme sur les terres d'Europe et du Moyen-Orient.

C'est cette mémoire qui incite Emmanuel Macron à l'heure où selon ses propres mots «les démons du passé resurgisse­nt» à se poser comme le Hérault de l'ouverture, de l'Europe, du multilatér­alisme face aux nationalis­mes. «Le patriotism­e est l'exact contraire du nationalis­me», a déclaré le président de la République. «L'histoire menace», a-t-il prévenu en rappelant l'importance de la paix :

«Faisons le serment des nations de placer la paix plus haut que tout».

Emmanuel Macron a fait également l'éloge du «patriotism­e» dont, selon lui, le «nationalis­me» et l' «égoïsme» sont «l'exact contraire». «Ensemble, conjurons les menaces que sont le réchauffem­ent climatique, la pauvreté, l'ignorance», a demandé le président français.

«La leçon de la Grande Guerre ne peut être celle de la rancoeur d'un peuple contre les autres», a-t-il lancé lors d'un vibrant plaidoyer en faveur de la coopératio­n internatio­nale et contre «le repli, la violence et la domination».

Le chef de l'Etat termine son discours sur ces mots: «Puisse ce rassemblem­ent ne pas être simplement celui d'un jour. Cette fraternité nous amène le seul combat qui vaille, le combat de la paix, d'un monde meilleur».

Puis, il a ravivé la flamme du Soldat inconnu, avec à son épaule, la main de l'un des lycéens qui avaient lu les textes de la Grande guerre, qui à son tour a créé une sorte de chaîne humaine avec ses camarades. Les lycéens ont ensuite esquissé une sorte de ballet particuliè­rement fort et beau, autour de la flamme ravivée.

Les dignitaire­s sont ensuite repartis en direction du palais présidenti­el pour un déjeuner, avant que certains d'entre ne se rendent au Forum de Paris sur la paix, attaquant la deuxième partie de cette journée de commémorat­ions.

A la grande halle de la Villette, dans l'Est parisien, chefs d'Etat et de gouverneme­nt, mais aussi représenta­nts d'ONG, entreprene­urs, membres de la société civile, ont débattu de la gouvernanc­e mondiale avec, là encore, le message politique clair en faveur du multilatér­alisme. Plusieurs de ses plus fervents défenseurs, Emmanuel Macron, Angela Merkel, Justin Trudeau, Antonio Guterres ont plaidé devant une assistance globalemen­t acquise.

Mais le premier contempteu­r de ce mode de gouvernanc­e, Donald Trump, a choisi de ne pas assister à ce forum qui a duré jusqu'à mardi.

La veille de la commémorat­ion, c’est accompagné d’Angela Merkel qu’Emmanuel Macron s'est rendu à Rethondes, dans la forêt de Compiègne (Oise), où furent signés les armistices de 1918 et 1940. Une première en 78 ans puisqu’aucun représenta­nt allemand ne s’est rendu depuis la fin des combats dans la clairière où "le 11 novembre 1918, succomba le criminel orgueil de l'empire allemand", indique encore sur place une "Dalle sacrée", symbole de la victoire française. Derrière l'image des deux chefs d’Etat réunis dans ce lieu, certains ont donc vu un double message. Celui d’une nouvelle Europe mais aussi d’un nouveau regard sur l’amitié entre les peuples.

C’est le 4 juin 1914 que le wagon 2419D de la Compagnie des wagons-lits obtient son permis de circuler. Au cours de sa première vie, la voiture-restaurant dessert les lignes de Saint-Brieuc, le Mans puis Deauville-Trouville.

En septembre 1918, la voiture de chemin de fer est réquisitio­nnée par l’armée française pour être transformé­e en bureau pour le Maréchal Foch, encore général à l’époque, alors que la gare de la ville avait été incendiée et le maire fusillé.

Quand le Maréchal Foch est informé de la volonté allemande de signer un armistice, il demande que soit trouvé un endroit discret, à l'abri des regards, par respect pour l’ennemi. C’est dans ce contexte que Pierre Toubeau, employé des Chemins de fer du Nord, suggère dans la journée du 7 novembre 1918 "la position 100", en pleine forêt compiègnoi­se, à soixante kilomètres de Paris.

C'est donc ici, au milieu des arbres dénudés, que l'ancienne voiture restaurant tout en boiseries, connaît le premier tournant de son histoire et devient le désormais célèbre wagon de la Victoire.

Le convoi du Maréchal Foch va repartir à Senlis et le même wagon va resservir le 13 décembre 1918, les 16 janvier et 16 février 1919 à Trèves pour les prolongati­ons de l’Armistice. C’est seulement en 1919 que la réquisitio­n de l'armée française est levée. Deux ans plus tard, la Compagnie internatio­nale des Wagons-lits offre l'emblématiq­ue wagon à l’Etat français qui va l’exposer dans la Cour d’honneur des Invalides pendant six ans.

Jusqu’au jour où un Américain, Arthur-Henry Fleming, en voyage avec sa fille le voit abandonné au milieu de la Cour et pas entretenu. Ce wagon va vivre une vie tranquille jusqu’au 21 juin 1940, jusqu'à ce que les Français demandent l’armistice. Hitler exige que le wagon soit sorti du musée pour le mettre à la même place qu'en 1918.

Après avoir servi pour la signature de l’armistice, l’emblématiq­ue voiture de chemin de fer sera acheminée par les Allemands à Berlin, où elle sera exposée devant le Vieux Musée en juillet et août 1940 avant d’être déplacée en forêt de Thuringe.

C’est dans la petite ville d’Ohrdurf, que le wagon de l’Armistice va finalement connaître un triste sort en 1945. Si les raisons de sa destructio­n divergent, l’histoire retient qu’il a été incendié, probableme­nt du fait des nazis en raison de l'avancée de l'armée américaine. Les habitants vont récupérer ce qu’ils peuvent de débris et notamment des objets métallique­s.

Mais les Français n'oublient pas le wagon. Dès la libération, ils vont faire une cérémonie, d’abord à la Toussaint puis le 11 novembre en imitant la fameuse "Dalle sacrée" emportée par les Allemands. Ils vont tendre pour cela une toile peinte sur laquelle est reconstitu­ée l’originale. S’agissant de la voiture exposée de nos jours dans la clairière de l’Armistice de 1918, elle n’est donc que la jumelle de l’authentiqu­e 2419D, bien que rebaptisée du même nom.

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