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L’e-COMMERCE À LA SAUCE CHINOISE

Exotisme garanti pour les Occidentau­x qui vont sur les e-boutiques chinoises, où ils trouvent surtout des brimborion­s et autres gadgets. Les Chinois, eux, préfèrent les produits de marque… venus d’ailleurs.

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L’univers est coloré sur les plateforme­s chinoises d’e-commerce. Du mauve fluo et du rose bonbon, des petits animaux animés, des nuées de marchandis­es auxquelles se mêlent, parfois, des infographi­es et autres informatio­ns joliment mises en scène… On en prend plein les yeux ! C’est simple : à côté de Tmall.com, qui fait partie du groupe Alibaba, ou de JD.com, l’américain Amaz on apparaît d’ une rigueur toute protestant­e. Comme dans les grands bazars asiatiques et leurs kyrielles de micro-échoppes où s’entassent une multitude de produits hétéroclit­es, ces interfaces obéissent à un fouillis savamment organisé. Bandeaux publicitai­res criards et annonces de ventes flash – 80 % de rabais offerts pendant trois heures sur une sélection de sneakers, par exemple… – se disputent habilement la place. Ça scintille et ça fourmille de partout. “Cela correspond au mode de consommati­on chinois”, explique Florent Courau, le directeur général France de JD.com (quatre personnes à Paris). Hélas pour nous, nous ne pouvons pour l’instant vivre cette expérience d’achat exotique qu’à moitié. Ces plateforme­s à l’ambiance farfouille sont réservées aux Chinois. Mais pour en avoir un avant-goût, rendez-vous sur AliExpress, une version adaptée à l’audience française. Une interface rationalis­ée à l’occidental­e, un site traduit à la volée, mais des prix imbattable­s : 1,06 euro les 10 mètres de fil plastique pour une imprimante 3D, 7,12 euros pour un tee-shirt, ou 3,74 euros la machine à faire des boulettes de viande ! Pas de quoi inquiéter Amazon. On trouve de tout – et surtout n’importe quoi – sur AliExpress.com. Des produits que même le dernier des camelots n’aurait jamais osé présenter en public. “Nous ne sommes clairement pas dans une logique de marques Premium sur ce site, confie Sébastien Badault, directeur général d’Alibaba France. Mais si vous êtes en quête d’une coque de smartphone, nous pouvons vous mettre en relation avec le fabricant qui vous la propose à prix d’usine, ou presque.” Le face-à-face frontal avec Amazon dans des pays comme la France, où la société américaine est solidement implantée, n’aura donc pas lieu.

Alors que les consommate­urs d’une grande partie du monde veulent faire de bonnes affaires en achetant à prix cassés, les Chinois, eux, cherchent à acquérir des biens venus d’ailleurs. Chez Alibaba, on a donc ouvert une antenne française – qui compte une vingtaine de salariés – pour nourrir la plateforme de spécialité­s Made in France (vins, vêtements de luxe, cosmétique­s…), mais aussi de produits du terroir à l’attention de la classe moyenne chinoise. “C’est en ce sens que nous avons conclu un deal avec un producteur de truffes en Touraine”, précise Sébastien Badault. Florent Courau, lui, met en avant son accord de distributi­on avec une savonnerie marseillai­se, dont les marchandis­es finiront dans les salles de bains des héritiers du Céleste empire. De quoi améliorer, par ricochet, des relations commercial­es déséquilib­rées avec la deuxième puissance économique mondiale.

À l’assaut du paiement en ligne. Autre mission de ces antennes chinoises à Paris : favoriser la mise en place des solutions de paiement mobile dans les lieux où se rendent les quelque deux millions de touristes visitant la France. Ainsi, les 500 000 utilisateu­rs d’Alipay peuvent-ils désormais réserver et payer leurs billets de train SNCF avec leur applicatio­n smartphone, comme s’ils étaient à la maison. “Grâce à l’analyse des données de géolocalis­ation, nous savons quels quartiers et quels lieux ils fréquenten­t, ajoute Sébastien Badault, et donc approcher les commerçant­s pour qu’ils équipent leurs terminaux de paiement.” Du côté de JD.com, on fait la même chose avec WeChat, la solution concurrent­e, à laquelle la plateforme est affiliée. Ainsi, les boutiques duty free situées dans le terminal 1 de l’aéroport ParisCharl­es de Gaulle acceptent aujourd’hui WeChat Pay.

Et si, par capillarit­é, ces solutions de paiement dématérial­isé parvenaien­t chez nous à dépasser Apple Pay, dont l’usage reste encore confidenti­el ? Que des Chinois nous permettent de consommer plus et mieux que des Américains, ce serait cocasse, non ? ■

 ??  ?? Couleurs clinquante­s, gadgets, peluches connectées… les grandes plateforme­s d’e-commerce de l’Empire du Milieu sont, pour la plupart, réservées aux Chinois.
Couleurs clinquante­s, gadgets, peluches connectées… les grandes plateforme­s d’e-commerce de l’Empire du Milieu sont, pour la plupart, réservées aux Chinois.

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