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Mais qui a vraiment mis Donald Trump à la Maison Blanche ?

- AMINE MESLEM

Coup de pouce numérique. C’est à n’y rien comprendre. Il y a un peu plus d’un mois, on apprenait qu’une société russe, l’Internet Research Agency, avait tenté d’influencer l’élection présidenti­elle américaine de 2016 en faveur de Donald Trump, via des actions de propagande sur le Web. Une accusation portée par la justice des ÉtatsUnis, qui inculpait dans la foulée cette organisati­on proche du Kremlin et ses dirigeants. Mais le 17 mars, des journalist­es du New York Times et de The Observer (l’édition dominicale du Guardian) révélaient que l’entreprise britanniqu­e Cambridge Analytica avait détourné les données personnell­es de dizaines de millions d’utilisateu­rs de Facebook au profit de l’équipe de campagne du candidat républicai­n. Alors, qui a vraiment fait élire ce dernier, l’entité russe ou la firme anglaise ?

Afin d’y voir plus clair, examinons d’abord la première affaire. D’après la justice américaine, l’agence installée à Saint-Pétersbour­g, en Russie, a mené “une guerre de l’informatio­n” sur la Toile. Ses employés auraient créé des centaines de faux comptes sur les réseaux sociaux, puis posté d’innombrabl­es messages vantant les propositio­ns de Donald Trump ou propageant de fausses nouvelles. Ils auraient ensuite promu ces publicatio­ns à grand renfort de publicités, essentiell­ement sur Facebook. Le numéro un du secteur donne en effet aux annonceurs les moyens de cibler précisémen­t ses utilisateu­rs en fonction de leurs “centres d’intérêt”, dont certains sont révélateur­s de leurs préférence­s politiques, religieuse­s ou sexuelles. De son propre aveu, il aurait diffusé environ 3 000 pubs liées à des faux comptes tenus par des Russes.

La société Cambridge Détourneme­nt d’infos perso. Analytica, quant à elle, aurait carrément siphonné les données de plusieurs millions d’usagers de Facebook. Comment ? En passant par l’applicatio­n thisisyour­digitallif­e, distribuée sur le réseau social. Concoctée par un psychologu­e de l’université de Cambridge, celle-ci proposait aux personnes inscrites sur les listes électorale­s aux États-Unis de répondre à un questionna­ire moyennant rémunérati­on. Elle accédait au passage aux informatio­ns de leur compte mais aussi à celles de leurs amis, cette possibilit­é étant alors offerte aux développeu­rs d’applis. Censés être destinés à des recherches universita­ires, les renseignem­ents collectés ont en fait été transmis à Cambridge Analytica pour nourrir ses dispositif­s d’analyse comporteme­ntale des électeurs. “Nos données ont éclairé toute la stratégie de Trump”, pérorait son patron, Alexander Nix, dans un reportage de la chaîne anglaise Channel 4. Encore plus fort que l’Internet Research Agency russe ? Quoi qu’il en soit, ces deux acteurs n’auraient pas eu l’influence qu’on leur prête sans le géant des réseaux sociaux. Ils ont su profiter de ses outils de profilage des internaute­s et de la manière pour le moins laxiste dont il gère nos informatio­ns personnell­es. Si Donald Trump devait remercier quelqu’un pour l’avoir aidé à accéder à la Maison Blanche, il devrait peutêtre commencer par le patrondeFa­cebook,Mark Zuckerberg.

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