Diététique ou synthétique, à chacun son régime
En fonction de vos données anthropométriques, de vos préférences culinaires, de vos contraintes budgétaires mais aussi de votre savoir-faire devant les fourneaux, vous aurez demain la possibilité de recevoir des recommandations alimentaires personnalisées. Elles pourront être disponibles sur votre smartphone, par exemple. Les données permettant d’élaborer ces recettes sur mesure résulteront de l’analyse de vos traces numériques : historique de navigation, tickets de caisse, activité sur les réseaux sociaux ou [suivi] de votre condition physique… Neurosciences, [disciplines] comportementales et intelligence artificielle se ligueront pour établir ces régimes diététiques
[…] qui conduiront à améliorer [la] qualité de l’alimentation des populations.
Dans trente ans, nous serons 9 milliards d’êtres humains sur la planète. Et il n’y aura pas suffisamment de protéines, essentielles à notre alimentation, pour tout le monde. Manger des insectes comme les grillons et les criquets – également sources de lipides – sera l’une des solutions. Saviez-vous que la chenille mopane, très présente en Afrique, est deux fois plus nourrissante que le boeuf ? Dans l’Union européenne, servir ou vendre des plats à base d’insectes reste pour le moment interdit. Pourtant, on peut déjà en trouver dans des boutiques spécialisées. Nous devrions aussi nous nourrir d’algues, riches en protéines et micronutriments. On les trouvera sous forme de farines ou dans des produits transformés, par exemple des barres énergétiques. Comme quoi, le bio et les circuits courts ne constituent pas à eux seuls l’avenir de notre alimentation.
Jean-Michel Chardigny DIRECTEUR DE RECHERCHE AU SEIN DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE (INRA).
Mélangez une cuillerée à soupe de protéines en poudre à trois cuillerées d’eau. Chauffez la pâte obtenue, et voilà un steak ! Non, ce n’est pas de la viande – ça n’en a d’ailleurs pas le goût – mais, sur le plan de la composition, c’est la même chose. Ajoutez des couleurs, des odeurs et des saveurs à cette sorte d’omelette épaisse, vous obtiendrez un plat réjouissant pour l’oeil comme pour le palais.
Demain, que vous le vouliez ou non, vous en viendrez à imiter de grands chefs convertis à cette nouvelle cuisine. À l’image d’Andrea Camastra, le premier à l’avoir adoptée, à la fin de l’année dernière, dans son restaurant étoilé de Varsovie. Comme lui, vous composerez vos plats “note à note”, avec pour ingrédients des composés purs : protéines, lipides, sucres, acides aminés… Ne grimacez pas ! Oui, il s’agit d’une cuisine de synthèse. Mais vous allez découvrir de nouveaux horizons sensoriels, des goûts et des consistances inédits. Avec l’imprimante 3D alimentaire qui aura remplacé votre robot multifonction, vous serez en mesure de produire automatiquement plus de 500 milliards de combinaisons culinaires.
En plus, ce sera bon pour la planète. Parce que la conservation des poudres et concentrés que vous emploierez ne réclamera plus de réfrigération. Surtout, leur transport nécessitera des conteneurs nettement moins volumineux que ceux servant actuellement pour les denrées fraîches.
Nicolas Darcel MAÎTRE DE CONFÉRENCES À AGROPARISTECH, LORS DE LA CONFÉRENCE “QUELLES INNOVATIONS POUR L’ALIMENTATION DE DEMAIN ?”, SEPTEMBRE 2017.
Hervé This PHYSICO-CHIMISTE, DIRECTEUR DU CENTRE INTERNATIONAL DE GASTRONOMIE MOLÉCULAIRE À AGROPARISTECH.