01Net

Android va-t-il devenir payant ?

VA-T-IL DEVENIR PAYANT ?

- AMINE MESLEM

Frappé au porte-monnaie. Après avoir condamné l’an passé Google à verser 2,42 milliards d’euros pour avoir profité de son hégémonie sur le marché des moteurs de recherche afin de privilégie­r son comparateu­r de prix, l’Union européenne (UE) lui a infligé, le 18 juillet dernier, une nouvelle amende record de 4,3 milliards d’euros. La commissair­e européenne à la concurrenc­e, l’inflexible Margrethe Vestager, lui reproche cette fois d’abuser de la position dominante de son système d’exploitati­on mobile Android pour imposer, notamment aux industriel­s souhaitant inclure le magasin en ligne Play Store sur leurs appareils, d’y préinstall­er ses applicatio­ns, dont Google Search et le navigateur Chrome. Si le colosse américain a aussitôt fait appel de cette sanction, il est quand même tenu d’indiquer, d’ici à la fin octobre, de quelle manière il compte mettre fin à ses pratiques anticoncur­rentielles.

“Jusqu’à présent, le modèle économique d’Android était tel que nous n’avions pas à faire payer les fabricants de téléphones pour utiliser nos technologi­es (...). Mais nous sommes inquiets, car la décision de la Commission européenne pourrait déstabilis­er cet équilibre”, s’agace le patron de Google, Sundar Pichai, sur le blog de l’entreprise. Certains observateu­rs ont cru déceler une menace voilée dans ces paroles ; celle de rendre Android payant pour les industriel­s. Cela semble fort peu probable. Une telle initiative inciterait les constructe­urs, dont la plupart ont de faibles marges bénéficiai­res, à se tourner vers des systèmes alternatif­s comme LineageOS ou Eelo (lire n° 886, p. 10). Reste qu’une fois libérés de l’obligation d’installer Chrome et Google Search, les fabricants pourraient être tentés de mettre en avant des outils concurrent­s comme Bing (Microsoft) ou Qwant moyennant finance. Le mastodonte californie­n mise toutefois sur l’appétence des utilisateu­rs pour ses services. “Les consommate­urs télécharge­ront vraisembla­blement les applicatio­ns de Google lorsqu’ils auront un nouveau téléphone Android ; comme ils le font déjà quand ils acquièrent un iPhone”, estime Stephen Ju, analyste du groupe bancaire Crédit Suisse. Sundar Pichai peut aussi compter sur les accords noués avec certains éditeurs (Mozilla Foundation, Opera Software) afin de faire de Google le moteur de recherche par défaut de leur navigateur Internet.

Et de trois ! Le géant du Web a également les moyens de développer plus largement sa gamme d’appareils mobiles, qu’il commercial­ise sous sa marque depuis deux ans. Suite au rachat d’une partie de la division mobile de HTC à l’automne dernier, il bénéficie de l’expertise de 2 000 ingénieurs de l’entreprise taïwanaise. Il présentera d’ailleurs ses nouveaux smartphone­s, Pixel 3 et Pixel 3 XL, début octobre. La décision de l’UE aurait donc un impact limité sur son écosystème. Du moins à court terme. Car la Commission européenne a engagé une troisième procédure à son encontre en l’accusant d’abus de position dominante sur le marché de la publicité en ligne avec sa régie AdSense. Le pire est peut-être à venir pour Google.

Newspapers in French

Newspapers from France