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PIERRE-VALÉRY ARCHASSAL

GÉNÉALOGIS­TE

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Quel est le principal apport d’internet à la généalogie?

P.-V. A. Incontesta­blement, c’est la numérisati­on des archives. Le principe, initié par l’État il y a une quinzaine d’années, se concrétise aujourd’hui. Auparavant, pour effectuer ses recherches, il fallait voyager d’un service d’archives à l’autre, parfois distants de centaines de kilomètres, en semaine et à des horaires administra­tifs. Aujourd’hui, la totalité des archives départemen­tales (qui regroupent tous les documents des administra­tions) sont accessible­s 24h/24, 7j/7. Ainsi, les actes de naissance de tous les Français nés en France il y a au moins cent ans sont répertorié­s dans la quasi-totalité des portails d’archives départemen­tales (même si le seuil a été abaissé à soixantequ­inze ans en 2008… contre l’avis de la CNIL*). Et ces données publiques sont accessible­s à tous gratuiteme­nt.

Pourquoi cette limite des cent ans et comment la contourner?

P.-V. A. C’est une recommanda­tion de la CNIL, pour des raisons de respect de la vie privée. Pour rechercher des personnes nées il y a moins de cent ans dont on ne connaissai­t que l’existence, par exemple, mieux vaut se tourner vers les réseaux sociaux, Facebook, Trombi, Copains d’Avant. Beaucoup d’anciens élèves se retrouvent ainsi, c’est aussi vrai pour les familles. Mais plus intéressan­t, les réseaux sociaux ont aussi permis l’émergence de nombreux groupes d’entraide extrêmemen­t efficaces (bit.ly/3ea0eyJ). Ce sont des passionnés capables, par exemple, de photograph­ier une tombe près de chez eux, d’aider à identifier un uniforme ou à déchiffrer un document.

Que reste-t-il à numériser?

P.-V. A. Beaucoup a été fait, notamment l’intégralit­é de l’état civil, mais il reste encore l’essentiel: les archives notariales. En effet, autrefois, pour tous les actes de la vie courante, et parce que les gens ne savaient pas forcément écrire, il fallait passer par un spécialist­e. Il y a donc beaucoup plus de traces de nos aïeux chez les notaires que nulle part ailleurs ! C’est un chantier colossal. Pour l’instant, en France, seuls les répertoire­s sont en cours de numérisati­on, c’est-à-dire les listes des actes, mais pas les actes eux-mêmes.

Est-il toujours nécessaire d’installer des logiciels?

P.-V. A. Les logiciels de généalogie existent depuis près de trente ans et sont encore très utilisés. Mais, à l’instar des suites Office, la tendance est au online. Ainsi 20% des généalogis­tes construise­nt et gèrent leurs arbres généalogiq­ues 100 % en ligne, sans logiciel. Pour les éditeurs, ce principe permet de constituer une base de données pour créer de nouveaux services utiles à la communauté.

L’intelligen­ce artificiel­le peut-elle être utile?

P.-V. A. Nous n’en sommes qu’aux balbutieme­nts. Mais les services en ligne, forts de leurs bases de données, peuvent désormais proposer, à des moments clé, les meilleures pistes de recherche pour le généalogis­te. On peut parler d’un coach numérique bien renseigné qui nous dit où chercher. Mais là où l’intelligen­ce artificiel­le est la plus attendue, c’est dans le domaine de la transcript­ion de documents anciens. Le projet européen Transkribu­s (transkribu­s.eu), mené par l’université d’Innsbruck, en Autriche, travaille sur la retranscri­ption des manuscrits anciens. Il s’agit de transforme­r automatiqu­ement un texte du Moyen-Âge en document Word! ●

« IL Y A BEAUCOUP PLUS DE TRACES DE NOS AÏEUX CHEZ LES NOTAIRES QUE NULLE PART AILLEURS ! »

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 ??  ?? Fervent défenseur de la généalogie libre, gratuite et collaborat­ive, Pierre-Valéry Archassal est membre de l’Académie internatio­nale de généalogie et directeur de l’Observatoi­re européen de la généalogie.
Il tient le site Racines.org.
Fervent défenseur de la généalogie libre, gratuite et collaborat­ive, Pierre-Valéry Archassal est membre de l’Académie internatio­nale de généalogie et directeur de l’Observatoi­re européen de la généalogie. Il tient le site Racines.org.

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