Le grand bond en avant
ÉLECTION Mélenchon a dépassé Hamon dans les sondages
«On s’attendait à une hausse, mais à ce point… » Depuis un peu plus de deux semaines, Antoine Léaument, le coordinateur de la campagne numérique de Jean-Luc Mélenchon, observe avec plaisir l’envol du candidat de La France insoumise sur le Web. Les déclencheurs ? Sa marche pour une VIe République à Paris, le 18 mars, et le premier débat entre cinq candidats, le 20 mars. Une double date charnière qui correspond aussi au début de l’inversion des courbes sondagières entre les deux candidats de la gauche, lui et Benoît Hamon. Si les sondages sont à prendre avec précaution, ils dessinent toutefois une dynamique étonnante en faveur de Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, dans l’enquête de l’Ifop diffusée mercredi, le candidat de La France insoumise progresse à 16 %, talonnant François Fillon à 18 %. Pour le communicant Philippe Moreau Chevrolet, à la tête de MCBG Conseil, le candidat a fait évoluer son image entre le débat du 20 mars et le débat à onze, mardi. Ce soir-là, « les “petits” candidats, plus radicaux ou extrêmes, l’ont aidé à apaiser son image, à la rendre plus présidentielle, plus rassurante ». Mélenchon ne s’y est d’ailleurs pas trompé, posant en une du Journal du Dimanche, le 2 avril, sous la mention : « Je deviens une figure rassurante. » « Jean-Luc Mélenchon a eu le temps de se dédiaboliser, en étant moins agressif vis-à-vis des médias, en revendiquant une étiquette écologiste et d’homme honnête. Il est dans les pas de cette génération de leaders à gauche, assez âgés, bruts de décoffrage, comme Bernie Sanders aux Etats-Unis ou Jeremy Corbyn au Royaume-Uni », souligne Philippe Moreau Chevrolet.
Une marge de progression ?
Mais quelle est réellement la marge de progression de Jean-Luc Mélenchon ? Lui permettra-t-elle de dépasser François Fillon et de se positionner pour une qualification au second tour ? Si « la porosité entre son électorat et celui de Benoît Hamon a tourné à son avantage, il ne peut plus trop progresser de ce côté-là, explique Yves-Marie Cann, de l’institut Elabe. Il peut prendre à Emmanuel Macron, dont l’électorat est friable (...) ; il peut piocher chez Marine Le Pen, où d’anciens électeurs de gauche orientés FN pourraient être tentés par lui ; et surtout, il peut séduire les abstentionnistes ou les indécis qu’il vise. »