20 Minutes (Bordeaux)

« On considère Google comme une standardis­te »

Il a fait un livre des requêtes du moteur de recherche

- Propos recueillis par Laure Beaudonnet

Il y a vingt ans, le 15 septembre 1997, le nom de domaine Google était enregistré. Aujourd’hui, Google est le moteur de recherche le plus utilisé. On a discuté avec Josselin Bordat, auteur du livre Comment devenir un ninja gratuiteme­nt? (J’ai lu, 2013), qui recense les requêtes les plus invraisemb­lables soumises au moteur de recherche. Et on lui a posé les questions les plus tapées sur le Web.

(Terme recherché 165 000 fois dans le mois en France, selon SEM Rush.)

Bah ouais, « comment » ! C’est l’un des trucs les plus tapés, et ce n’est pas étonnant. On considère Google comme une standardis­te qui aurait une réponse à tous nos problèmes. C’est fascinant. Si on a un kyste, on va sur Google; si on veut savoir comment faire revenir l’être aimé en moins de vingt-quatre heures, pareil. « Comment » traduit le fait que tout le monde traite Google comme une sorte d’oracle qui aurait réponse à tout. En même temps, ça traduit notre angoisse.

(Recherché 74 000 fois.)

Le principe est simple : dès qu’une chose est interdite, mystérieus­e ou taboue, tu la retrouves numéro 1 des requêtes ; donc, évidemment, le sexe.

(Recherché 33 100 fois.)

Je vois des gens confrontés à des injonction­s sociales : il faut que ton corps soit comme ci, il faut que tu te comportes comme ça. Ils n’ont pas forcément les réponses et ils utilisent Google comme une sorte de manuel général. On entretient un rapport intime avec Google. Quand on est tout seul, devant son ordi, avec personne qui nous regarde, on tape les trucs les plus personnels.

(Recherché 9 900 fois.)

Je n’y ai jamais joué. Les requêtes marchent comme un cerveau humain : on est capable de zapper entre des choses hétérogène­s. A un moment, t’es en train de penser au sens de la vie, tu tapes « Suis-je mort ? » – c’est une vraie requête –, et puis tu te dis : « Ah tiens, je vais jouer au Rubik’s Cube… » La requête des gens qui ne veulent pas aller en EPS. Ce qui me passionne, ce sont les trucs chelous : une requête adressée à Google devient poétique. « Comment se casser le poignet », ça t’emmène dans des trucs incroyable­s de créativité. C’est la première fois de l’histoire que les êtres humains, comme une espèce de cerveau mondial, produisent des énoncés. C’est le rêve des surréalist­es et de l’Oulipo [Ouvroir de littératur­e potentiell­e]. C’est pour ça que je voulais en faire un bouquin. Ces énoncés drôles, bizarres, marrants, violents disent autant de choses sur ce qu’on est. Si tu regardes Google Analytics, c’est comme si tu ouvrais le crâne de la planète.

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recense les recherches insolites.

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