20 Minutes (Bordeaux)

Vieux frères

Pour les 20 ans de l’album « L’Ecole du micro d’argent », et ses tubes « Petit Frère » ou « Demain, c’est loin », le groupe IAM repart pour une grande tournée.

- Benjamin Chapon

Il y a vingt ans sortait L’Ecole du micro d’argent, troisième album d’IAM. Et le monde du rap français allait s’en trouver bouleversé. « Nés sous la même étoile », « L’Empire du côté obscur », « Petit Frère » ou encore, et surtout, « Demain, c’est loin », considéré par certains comme le meilleur titre de rap français. Outre ces tubes, l’album est devenu emblématiq­ue de la percée du rap. « On s’est rendu compte après coup que cet album a marqué les gens, raconte aujourd’hui Shurik’n. Il y avait toute une effervesce­nce à cette époque à Marseille, une créativité et les moyens de travailler, une facilité à sortir des disques. Cet anniversai­re, c’est aussi l’anniversai­re d’une époque bénie. » Pour marquer le coup, le groupe a ressorti l’album, il y a quelques mois, agrémenté d’inédits. Et les compères repartent dans une grande tournée des Zénith (jusqu’au 5 décembre) avec ces chansons de 1997. « On avait vite switché sur autre chose à l’époque, raconte Shurik’n. Au vu de la popularité de l’album et du caractère inachevé de la tournée de l’époque, on s’est dit qu’il fallait faire quelque chose. » Akhenaton pointe le paradoxe : « C’est l’album qu’on a le plus vendu et avec lequel on a le moins tourné. Aujourd’hui, la musique vit plus sur scène qu’à l’époque. » Au temps de L’Ecole du micro d’argent, IAM ne se posait pas de questions. « C’était une époque géniale pour le rap, se souvient Akhenaton. C’est à ce moment-là que ça a basculé pour nous. Avant la sortie de l’album, on avait réservé des salles comme l’Elysée-Montmartre [à Paris] ou le théâtre Barbey à Bordeaux. Finalement, face à la demande, on n’a fait que des Zénith. » IAM refuse pour autant de verser dans la nostalgie de vieux grognons. « Le rap d’aujourd’hui, ça ressemble à de la pub, dit en rigolant Shurik’n. Les couplets sont plus courts que le refrain ! Il y a une phrase forte, un gimmick, et c’est tout. Cela dit, ce n’est pas nouveau. La “trap music” est née dans les clubs du sud des EtatsUnis. La phrase autour de laquelle tourne le morceau fait tout. Ça ressemble plus à de la house que du rap. Mais, à nos débuts, on était très marqué par la musique new-yorkaise des années 1970, qui était aussi dans cet esprit très dansant. »

« Encore de bons groupes »

Par ailleurs, Akhenaton reconnaît aux jeunes rappeurs de 2017 leur capacité à avoir emmené le rap dans tous les ménages français. « Ils ont mis le système à l’amende, ils ont été virés par la porte et sont revenus par la fenêtre. Ils produisent eux-mêmes, ils n’ont plus besoin de personne. Nous, on devait faire du très bon son parce qu’on devait sonner sur CD et dans les salles. Eux, ils produisent pour être écoutés en streaming sur des téléphones. » Bien qu’ils ne se reconnaiss­ent pas dans les production­s rap actuelles, les membres d’IAM notent qu’il y a toujours de nouvelles choses à découvrir. « Je ne comprends pas les gens qui nous disent : “Ha pétard, c’était bien avant !” Il y a toujours de bons groupes. Mais ce n’est pas en écoutant NRJ que vous allez les découvrir. Il faut fouiller, il faut “digger”, si vous aimez vraiment le rap. »

« C’est l’album qu’on a le plus vendu et avec lequel on a le moins tourné. »

Akhenaton

 ??  ?? Shurik’n (à gauche) et Akhenaton (à droite) d’IAM à Nice, en 2013.
Shurik’n (à gauche) et Akhenaton (à droite) d’IAM à Nice, en 2013.
 ??  ?? Shurik’n (à g.) et Akhenaton, les chanteurs du groupe marseillai­s, en concert au Théâtre de verdure de Nice, en 2013.
Shurik’n (à g.) et Akhenaton, les chanteurs du groupe marseillai­s, en concert au Théâtre de verdure de Nice, en 2013.

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