20 Minutes (Bordeaux)

Un fantôme tout blanc, tremblant et troublant

« A Ghost Story » est un film exceptionn­el

- Caroline Vié

N’ayons pas peur des mots : A Ghost Story de David Lowery est l’un des meilleurs films de 2017. Rooney Mara et Casey Affleck incarnent un couple dont le destin est brisé par un accident. Après sa mort, l’homme revient hanter la maison où il vivait. « J’adore l’iconograph­ie du fantôme en drap blanc, précise David Lowery dans le dossier de presse. Vous pouvez montrer cette image à n’importe qui dans le monde, il saura ce qu’elle représente. » Dans un tweet, Guillermo del Toro décrit le film comme un « joyau précieux sur les plus grands générateur­s de fantômes : l’amour et le deuil ». 20 Minutes explique pourquoi ce film multi-récompensé au festival de Deauville est si exceptionn­el.

Parce qu’il fallait oser. Réaliser un long-métrage sur un gars mutique planqué dans un drap avec deux trous noirs pour les yeux était pour le moins culotté. Le langage corporel de Casey Affleck fait comprendre sa solitude atroce dans un univers où le temps n’a plus aucun sens.

Parce que c’est beau. L’errance du fantôme dans l’endroit où il a été heureux est saisie avec une grande sobriété par le réalisateu­r des Amants du Texas et de Peter et Elliott le dragon. Il suit celui-ci dans ses promenades, entraînant un spectateur envoûté à son tour.

Parce que c’est triste. L’impuissanc­e du spectre face à son état et au monde qui l’entoure est poignante et touche au coeur. Témoin sensible, il ne peut plus que souffrir, même quand il croise un autre fantôme tout aussi perdu que lui. Enfin, comme il est mort, il ne peut plus mettre fin à ses jours.

Parce qu’on ne nous mâche pas le travail. Cette oeuvre contemplat­ive change agréableme­nt

du bruit et de la fureur de bien des production­s actuelles. David Lowery prend son temps et en donne au spectateur, afin que celui-ci puisse résoudre tout seul les questions que pose le film.

Parce qu’on s’identifie à fond. Pour paraphrase­r une chanson de Johnny, on a tous en nous un peu de ce fantôme tellement humain sous son suaire. Une bande-son lancinante signée Daniel Hart achève d’emporter le spectateur au point de lui faire ressentir des émotions aussi intenses que celles du spectre.

Parce que le budget est minimalist­e. Cette merveille a coûté moins de 500000 $ (423 000 €), ce qui lui vaut d’être nommée aux Independen­t Spirit Awards dans la catégorie des films à petit budget. Toutefois, la sensibilit­é et le talent prennent ici fort bien le pas sur la grandiloqu­ence des effets spéciaux.

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Après sa mort accidentel­le, un homme en drap blanc hante la maison dans laquelle il vivait.

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