Le fret ferroviaire, également touché par la grève de la SNCF et fragile économiquement, a-t-il un avenir ?
Le mouvement social contre la réforme de la SNCF a des conséquences sur un secteur déjà loin d’être florissant
La grève à la SNCF ne touche pas que les usagers. Le transport de marchandises par voie ferrée (fret ferroviaire) subit lui aussi les conséquences du mouvement contre la réforme ferroviaire (adoptée en première lecture mardi à l’Assemblée). Or, le secteur est loin d’être florissant : en 2016, moins de 10 % des marchandises étaient transportées par le rail en France, deux fois moins qu’il y a vingt ans. «Le fret (…) a trouvé son modèle économique, mais il est fragile. Il va être difficile de combler le manque à gagner si la grève se prolonge», affirme dans L’Usine nouvelle Franck Tuffereau, délégué général de l’Association française du rail (Afra). D’autant plus que le principal opérateur de fret en France appartient à la SNCF (baptisé Fret SNCF). Et avec un endettement de 4 milliards d’euros et des pertes qui s’accumulent (314 millions d’euros en 2016, 120 millions en 2017), la situation n’est déjà pas au beau fixe. Lundi, la SNCF a d’ailleurs annoncé son intention de transformer Fret SNCF en filiale du groupe d’ici à 2020. Cette opération doit permettre «d’isoler» cette activité (et les résultats financiers) du reste du groupe, tout en laissant la porte ouverte à une recapitalisation. Les contradictions de l’Etat « La grève des cheminots (…) va se traduire par une impossibilité des opérateurs de fret ferroviaire de faire circuler les trains prévus, désorganisant ainsi la logistique des chargeurs (…) Deux jours de grève représentent pour les acteurs du secteur l’équivalent d’une semaine d’activité perdue », souligne l’Afra. Pourtant, certains pays s’en sortent beaucoup mieux : en Suisse, par exemple, le ferroviaire représente 40% du transport de marchandises. Comment expliquer le retard de la France? En 2016, une analyse de France Inter donnait quelques réponses : coût plus élevé qu’une livraison par la route, multiplication des travaux de nuit sur les voies qui freinent la circulation des trains de marchandises. A cela s’ajoutent des faiblesses au niveau politique. « La politique de l’Etat en faveur du fret comporte des contradictions», relevait la Cour des comptes en septembre. Dans le même rapport, les Sages constataient que, malgré un discours très volontariste, les actes ne suivaient pas : ainsi, l’abandon de l’écotaxe fin 2014 n’avait, à l’époque, pas incité les entreprises à délaisser la route. Malgré la promesse d’un nouveau plan de relance pour le fret ferroviaire, la grève qui dure à la SNCF ne devrait pas les faire changer d’avis.