Bardem et Cruz ouvrent la marche
Le festival s’est ouvert avec la projection du subtil «Everybody Knows », mardi
La première (et dernière) fois que j’ai monté les marches avec une équipe de film, c’était en 1998 pour Las Vegas Parano, joyeux délire psychédélique adapté d’un roman de Hunter S. Thompson par Terry Gilliam, alors au sommet de sa forme. Un heureux hasard m’avait placé juste derrière Johnny Depp et Kate Moss. Sous le crépitement des flashs, en me mettant sur la pointe des pieds, je devenais la star. Vingt ans plus tard, j’ai voulu rééditer l’exploit lors de la cérémonie d’ouverture du 71e Festival de Cannes, mardi : me glisser entre Penélope Cruz et Javier Bardem, le couple le plus glamour de la compétition 2018.
Prenant et passionnant
Mais les temps ont changé. Les deux stars ne sont apparues qu’à la toute fin du cortège, d’abord avec l’équipe au complet du film Everybody Knows, projeté en ouverture du festival qui se terminera le 19 mai, puis seules. On ne prend plus le risque, comme il y a vingt ans, de laisser les badauds fricoter avec des vedettes sur le tapis rouge. Dans la salle, j’ai gardé deux places à côté de moi. Le duo de charme entre sous les applaudissements. « Hé, venez là ! Mais non : plus à gauche!» Hein? Ils se dirigent au centre, s’assoient là et n’en bougent plus. Tant pis. Edouard Baer entre en scène et commence son speech poétique et décalé, qui voit «Isabelle Adjani à un moment sur un sourire» et se demande bien « pourquoi, au col des Alpes, il y a des gens dont on ne veut pas qu’ils soient ici chez eux ». Une heure plus tard, Martin Scorsese, invité d’honneur de la Quinzaine des réalisateurs, demande à la présidente du jury, Cate Blanchett, de venir déclarer avec lui « le 71e Festival de Cannes ouvert ».
L’écran géant de l’auditorium LouisLumière peut alors s’ouvrir et le réalisateur Asghar Farhadi dérouler son oeuvre, Everybody Knows, un drame familial mâtiné de polar sur fond de mariage en Espagne. Vous n’aurez pas besoin d’être à Cannes pour en profiter : ce film subtil, prenant et passionnant sur ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas de notre passé quand il rattrape notre présent, sort ce mercredi en salles. Après Une séparation et Le Passé, du même cinéaste iranien, qui ont tous les deux dépassé le million de spectateurs dans l’Hexagone, voilà un film que vous n’aurez envie de manquer pour rien au monde. Ne nous demandez pas pourquoi, c’est comme ça. Et c’est pourquoi on ne vous dira rien de plus.