Le parti de mêler fiction et réalités
Le film «Le Poulain», réalisé par Mathieu Sapin, évoque les coulisses du pouvoir à travers deux regards
La politique, Mathieu Sapin connaît ça sur le bout des crayons. L’auteur des BD Le Château, qui évoque les coulisses du palais de l’Elysée, et Campagne présidentielle, à propos de celle de François Hollande (aux éditions Dargaud), transpose tout ce qu’il a observé dans Le Poulain, son premier film.
Un jeune homme innocent (Finnegan Oldfield) découvre les secrets du pouvoir avec une conseillère en communication incarnée par Alexandra Lamy. « Mon personnage s’appelle Arnaud Jaurès, et les gens le croient apparenté à Jean Jaurès, raconte Mathieu Sapin. C’est un peu l’expérience que j’ai connue quand j’ai enquêté pour mes albums. » Les interlocuteurs de l’auteur le ménageaient, parce qu’ils le prenaient pour un parent de l’ex-ministre Michel Sapin!
Alexandra Lamy féroce
Cet exemple est symbolique de la recette qu’il exploite malicieusement dans cette comédie réussie : un mélange des réalités qu’il a observées en gravitant autour du monde politique. « Le Poulain est un conte où Finnegan Oldfield serait la princesse et Alexandre Lamy la sorcière séduisante », plaisante-t-il. Si cette dernière a des dents qui raient le plancher, le gamin ne tarde pas à prendre du galon, tandis que les deux protagonistes soutiennent un candidat à l’Elysée pas très dynamique.
Les femmes que le réalisateur montre sont aussi dures que les hommes. « Cela m’amusait de tordre le cou à l’idée reçue selon laquelle les femmes sont plus douces que leurs homologues masculins », explique Mathieu Sapin. Le personnage d’Alexandra Lamy peut se montrer féroce, et ses consoeurs ne sont pas plus tendres, quand elles évoluent au sommet de l’Etat. Elles rabrouent leurs subordonnées, visent les plus hautes fonctions et sautent sur les stagiaires. « En écrivant avec Noé Debré, j’ai découvert une réalité en politique qui dépasse la fiction, confie Mathieu Sapin. Nous avions pensé à une péripétie où l’Angleterre quittait l’Europe, en croyant cela impossible. Puis le Brexit est arrivé et nous avons été obligés de changer le script ! » Voir son héros, jeune inconnu gravissant les marches du pouvoir en gagnant la confiance des puissants, aurait aussi pu sembler peu vraisemblable… «Mais l’affaire Benalla a démontré que nous n’étions pas tombés loin», s’amuse-t-il.