Mettons tous la main à l’appart
Plus qu’une simple coloc, l’habitat participatif associe écologie et désir de vie en commun
Pour vivre heureux, vivons groupés. C’est le credo de François Desrues qui vit depuis un an dans un habitat participatif à Strasbourg. Le projet a été conçu par ses résidents, du choix du terrain à l’architecte, en passant par la philosophie du bâtiment et ses règles de vie. Un immeuble écologique sur-mesure, où chacun vit dans son propre appartement, mais profite d’espaces gérés collectivement : jardin, buanderie, chambre d’ami partagée et salle des fêtes. « On recherchait plus de convivialité, de solidarité et de respect de l’environnement », explique François Desrues. Bâtir de l’habitat groupé peut coûter moins cher et permettre de réduire sa consommation énergétique. « Mais, ce qui est au coeur du projet, c’est cette volonté de créer une oasis, une bulle de valeurs autour de l’entraide et de l’autonomie », relève Pascal Greboval, auteur de Vivre en habitat participatif (éditions Alternatives). La recette a été adoptée depuis longtemps en Allemagne et dans les pays nordiques. En France, elle est en train de se faire une petite place. Lentement, mais sûrement, les îlots sortent de terre à Strasbourg, Lille, Bordeaux, Grenoble, etc. On compte aujourd’hui 600 habitats participatifs construits ou en cours de développement, selon la Coordin’Action, un réseau d’associations de l’habitat participatif. Autant dire, une goutte d’eau. Mais, en proposant un cadre juridique pour l’habitat participatif en 2014, la loi Alur a mis un coup de projecteur sur cette alternative et l’a rendue crédible aux yeux des pouvoirs publics. Depuis quelques années, les collectivités locales mettent à disposition des terrains et font des appels à projets pour encourager l’habitat groupé. Les organismes HLM impliquent leurs futurs locataires en amont de la construction. « C’est devenu un vrai marché, analyse Jean-Claude Driant, professeur à l’école d’urbanisme de Paris. Mais ça ne peut pas devenir un phénomène massif, car l’habitat participatif va à l’encontre des logiques économiques. »
En moyenne, un projet met quatre ans avant d’aboutir. Un investissement sans faille est de mise, avec des réunions régulières et des prises de décision collectives qui peuvent virer au casse-tête. Impossible de se lancer dans ce processus à la légère, confirme François Desrues : « Si on a l’âme d’un solitaire, ce n’est peutêtre pas la bonne option. Accepter d’être membre d’un groupe et être prêt à avoir des débats, cela suppose un changement de vision. Il faut embrasser cette dimension collective.» En immobilier aussi, l’important, c’est de participer.
« Créer une bulle de valeurs autour de l’entraide.» Pascal Greboval, auteur de Vivre en habitat participatif