«Certains groupes étaient mal connus»
La commissaire divisionnaire Cécile Augereau dirige le Sirasco, qui étudie et identifie les organisations criminelles en France
Trafic de drogue, braquages, blanchiment… Dans un immeuble moderne de Nanterre (Hauts-de-Seine), 26 analystes du Sirasco (Service d’information, de renseignement et d’analyse stratégique sur la criminalité organisée) recueillent et dissèquent, depuis septembre 2009, les infractions commises dans le pays, analysent les profils des auteurs, identifient des groupes criminels. Pour mieux comprendre le travail de ces policiers de l’ombre, 20 Minutes a interrogé, à l’occasion des dix ans de l’institution, la patronne du service, la commissaire divisionnaire Cécile Augereau.
Pourquoi le Sirasco a-t-il été créé en 2009 ?
A cette époque, on a commencé à voir émerger sur le territoire des organisations criminelles dont on connaissait mal le fonctionnement. Il s’agissait notamment de ces groupes géorgiens, les « voleurs dans la loi » [vory v zakone], qui étaient impliqués dans des cambriolages. On a alors compris qu’il était capital de mieux décrypter le fonctionnement des organisations criminelles qui agissaient en France. L’objectif du Sirasco est de partager de l’information, ce qui n’est pas forcément dans la culture des enquêteurs. Le Sirasco est donc une sorte de Wikipédia des organisations criminelles ?
C’est un peu plus que ça ! Le service central, composé de 26 fonctionnaires aux profils bien particuliers, est organisé en pôles d’analyse par secteur géographique : les Balkans, l’Asie, la Russie, la France, l’Afrique et l’Amérique, les mafias italiennes…. En 2013, le Sirasco a été renforcé grâce à la création de services territoriaux. Au niveau national, plus d’une centaine de personnes effectuent ce travail d’analyse du renseignement criminel au sein de la police judiciaire. On tend toujours plus vers une police guidée par le renseignement.
Quelles sont les différentes tendances en matière de criminalité organisée ?
Depuis quelques années, il y a deux infractions centrales : le trafic de stupéfiants et le blanchiment. On observe en particulier l’émergence de réseaux chinois qui vont blanchir l’argent issu du trafic de cannabis marocain. Le trafic de stupéfiants ne cesse de se diversifier. La coke, par exemple, est de plus en plus vendue dans les cités, car elle est plus rentable que le cannabis et des connexions ont été établies avec les producteurs. Sur notre sol agissent essentiellement des groupes criminels français, notamment issus du banditisme traditionnel, qui perdure. Mais aussi des réseaux étrangers, des groupes albanophones ou géorgiens. Tout ce qui touche à l’utilisation des nouvelles technologies nous intéresse également de plus en plus, car cela rend le fonctionnement de ces groupes très opaque.