20 Minutes (Bordeaux)

Deux camps remontés à bloc

Le Premier ministre britanniqu­e, Boris Johnson, reste sur ses positions, mais se heurte à l’opposition des parlementa­ires

- Thibaut Le Gal

Nouveau coup dur pour Boris Johnson. Samedi, le chef du gouverneme­nt britanniqu­e, qui n’a plus de majorité au Parlement, a vu sa ministre du Travail et des Retraites annoncer sa démission. Amber Rudd a justifié son départ par son désaccord avec la stratégie du Premier ministre sur le Brexit. Depuis plusieurs jours, la tactique de Boris Johnson est court-circuitée par le Parlement. Les députés, puis les lords, ont adopté la semaine passée une propositio­n de loi qui le contraint à repousser de trois mois la date du Brexit, prévu le 31 octobre, s’il ne trouve pas un accord de divorce avec l’Union européenne d’ici au 19 octobre. Le chef du parti conservate­ur, qui a décidé de suspendre le Parlement pendant plusieurs semaines, souhaite donner ce lundi une « dernière chance » à l’opposition de voter en faveur d’élections anticipées. « Chaque camp essaie de trouver des astuces, des outils institutio­nnels pour atteindre ses objectifs sur le Brexit, assure Olivier de France, responsabl­e du programme Europe à l’Institut des relations internatio­nales et stratégiqu­es (Iris). Boris Johnson se dit qu’un retour aux urnes pour obtenir une nouvelle majorité est la seule manière de sortir du blocage institutio­nnel.» Le leader britanniqu­e reste sur la même ligne : il dit préférer « mourir au fond d’un fossé » plutôt que de repousser une fois encore la sortie du pays.

Votée il y a plus de trois ans, la sortie du Royaume-Uni de l’UE reste toujours aussi floue et incertaine. Le Premier ministre britanniqu­e accuse, en creux, une partie de la classe politique britanniqu­e de jouer la carte de la souveraine­té populaire contre les institutio­ns.

« C’est un débat infini et inextricab­le, assure Emmanuelle Saulnier-Cassia, professeur­e de droit public et spécialist­e du Brexit. Le peuple a parlé via le référendum, un outil peu classique au Royaume-Uni, même s’il s’est multiplié ces dernières années, mais le Parlement reste souverain, et c’est par lui que la voix populaire se fait classiquem­ent entendre. »

« En décidant de soumettre le Brexit par référendum, [l’ex-Premier ministre] David Cameron a mis le doigt dans l’engrenage : il a alors opposé la légitimité populaire et la légitimité parlementa­ire. Depuis, le piège de Tocquevill­e [qui avait analysé ces tensions entre démocratie­s directe et représenta­tive] s’est refermé sur la plus vieille démocratie parlementa­ire, qui ne se fait plus confiance, analyse Olivier de France. Cette opposition des légitimité­s a polarisé encore plus le pays. Chaque camp se pose maintenant comme plus démocrate que l’autre. Boris Johnson veut faire respecter la volonté du peuple, alors que, paradoxale­ment, il n’est pas élu, et le Parlement élu dit que les Britanniqu­es n’ont pas voté pour une sortie sans accord. »

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Pro et anti-Brexit en train de se disputer à Londres, ce week-end.

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