20 Minutes (Bordeaux)

«Je ne connais pas un seul condamné pour bizutage »

Délit Le militant Jean-Claude Delarue s’offusque que la loi ne soit pas appliquée

- Propos recueillis par Rachel Garrat-Valcarcel

C’est une actualité qui revient à chaque rentrée : le bizutage. Cette année encore, la pratique a fait parler d’elle, avec plusieurs blessés à Rennes et un mort en Belgique, lors d’un événement organisé par une école rouennaise. Elle est pourtant interdite par la loi depuis vingt ans, tance Jean-Claude Delarue, président de SOS Bizutage.

Que dit la loi sur le bizutage ?

La loi de Ségolène Royal, qui date de 1998, dit que le bizutage, imposé ou «consenti», est interdit. Elle prévoit des peines de prison [six mois et 7 500 € d’amende] que je n’ai jamais vu appliquer.

Comment l’expliquez-vous ?

Je vais être un peu virulent : les «voyous» des quartiers et les «voyous» des beaux quartiers ne sont pas traités de la même façon. Je ne connais pas un seul condamné pour bizutage : j’ai l’impression qu’on ne veut surtout pas leur faire de la peine, les stigmatise­r, gêner la suite de leurs études, etc. Il y a quand même un côté justice ou comporteme­nt de classe. C’est aussi le directeur d’école qui a la trouille. Car faut-il encore que ça aille jusqu’au tribunal.

Malgré tout, grâce à cette loi, voit-on une régression du problème ?

Je suppose que oui. Mais le bizutage étant interdit, on ne le crie pas sur les toits. Le problème, c’est qu’il y a toujours une tentation de dominer le plus jeune, l’inférieur. Or, on ne peut pas lutter contre le harcèlemen­t en entreprise si on ne le combat pas dans la «préentrepr­ise» (…). En plus, avec les téléphones portables, les photos, les vidéos… tout cela circule.

Ce lundi, des militaires sont jugés pour la mort de Jallal Hami, élève officier à Saint-Cyr-Coëtquidan (Morbihan), lors de l’équivalent d’une soirée d’intégratio­n, en 2012. Les écoles militaires sont-elles des cas particulie­rs ?

Dans l’armée, quand il y a des ordres, vous obéissez. Là, l’école a des ordres qui disent : «On ne fait pas de bizutage.» Si même l’armée ne peut pas faire appliquer le règlement et la loi… Ce n’est pas supportabl­e.

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Lors d’un bizutage à Lyon, en 2010.

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