Les trucs et astuces d’une traductrice de comics
Eviter les contresens, rendre naturel le texte... La traductrice Eloïse de la Maison revient sur les subtilités de son métier
Afin de dénicher les talents de demain, 20 Minutes est partenaire du prix Jeunes Talents Comics, organisé par le Comic Con Paris, qui se tiendra du 25 au 27 octobre à Paris (19e), avec les éditions Urban Comics. Alors que le vote du public pour la meilleure cover est ouvert*, 20 Minutes explore les différents métiers des comics. Aujourd’hui, Eloïse de la Maison (photo), traductrice de 27 ans, raconte son parcours.
Ses premiers comicbooks. « J’avais 6 ou 7 ans quand je suis tombée sur des comics “Tomb Raider” chez le marchand de journaux, se souvient Eloïse de la Maison. J’ai vite commencé à les collectionner.» Mais, comme elle grandit à la campagne, où les comics sont «difficiles à trouver», elle lit aussi beaucoup de BD franco-belges de science-fiction, comme « Yoko Tsuno », « Sillage ».
Son moment-clé. Après une licence langues étrangères et appliquées et un master gestion multilingue de l’information, Eloïse de la Maison commence à travailler dans l’e-commerce, tout en souhaitant retourner vers les langues. «En 2013, j’ai rencontré le scénariste Jean-David Morvan, qui travaillait avec beaucoup d’artistes étrangers. Je me suis mise à traduire les scénarios qu’il leur envoyait.» Au festival d’Angoulême 2014, elle se retrouve à faire l’interprète pour une conférence du scénariste américano-cubain Ivan Brandon. L’éditeur Olivier Jalabert, qui monte alors la collection « Glénat Comics », lui propose de travailler avec lui.
Sa professionnalisation. La jeune femme commence avec « Pretty Deadly ». En parallèle, elle aide à lancer la nouvelle collection : « Il fallait présenter le projet aux éditeurs américains et aux auteurs, souvent non francophones : c’était beaucoup d’échanges qui impliquaient l’intervention de traducteurs. » Elle traduit ensuite le thriller d’anticipation « Letter 44 », puis «The Wicked + The Divine».
Sa particularité. « Pour traduire les comics, on attend que le paperback [le volume rassemblant tous les épisodes d’un même arc] soit paru, explique la jeune femme. Si je traduis les épisodes un à un, je risque de perdre en cohérence. » Après une première lecture et des échanges avec les auteurs, pour éviter les contresens, notamment, elle note sa traduction case par case. Le plus délicat? Traduire la BD sans qu’elle ait l’air d’avoir été traduite. Un travail d’autant plus difficile avec des textes contenant des références culturelles et des jeux de mots intraduisibles littéralement en français, comme « The Wicked + The Divine ». Enfin, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce sont les bulles les plus courtes qui sont les plus difficiles à traduire : « On ne peut pas écrire “putain, putain, putain” à la place de “fuck, fuck, fuck” sans avoir l’air de sortir des années 1980. »
* Jusqu’au 29 septembre sur bit.ly/2mpWbsV