20 Minutes (Bordeaux)

La revue « Prescrire » a «étudié le Mediator à fond dès 1997»

Le directeur de la revue, Bruno Toussaint, revient sur le scandale sanitaire

- Propos recueillis par Oihana Gabriel

Dès 1997, sa publicatio­n avait prévenu de l’inutilité du Mediator et des risques pour les patients. Médecin et directeur éditorial de Prescrire, Bruno Toussaint est auditionné ce mercredi à Paris, où se tient, pendant six mois, le procès du Mediator. Pour 20 Minutes, il revient sur ce scandale sanitaire.

Comment avez-vous été alertés sur la dangerosit­é du Mediator ?

En 1986, un médecin, abonné, nous a posé par courrier une question : «Est-ce que le Mediator est vraiment utile pour le diabète?» Dans la littératur­e scientifiq­ue, il n’y avait pas beaucoup de preuves. En 1995, une étude a montré que tous les coupe-faim augmentaie­nt le risque d’hypertensi­on artérielle pulmonaire. A partir de 1997, on a décidé d’étudier à fond ce médicament. On a publié deux dossiers prouvant qu’il n’y avait aucune preuve que le Mediator réduisait le risque de complicati­ons dans le diabète, comme dans l’excès de gras dans le sang. Mais qu’il existait des effets indésirabl­es. Il était donc inutile et manifestem­ent dangereux.

Puis les soupçons se sont accrus… En effet. En 2003, en 2005… A chaque fois que nous voyions passer une informatio­n sur le Mediator, nous la répercutio­ns dans Prescrire. Et c’est en voyant notre dossier qu’Irène Frachon a fait le rapprochem­ent entre ce qu’elle lisait et ce qu’elle voyait chez ses patients. Qu’est-ce qui a changé depuis les révélation­s sur le Mediator ?

Le procès met en lumière les conséquenc­es des conflits d’intérêts. Des gens ont été opérés du coeur ou sont même décédés parce que les liens étaient trop étroits entre le laboratoir­e et certains médecins. Depuis, un site a été créé, où tout le monde peut voir les liens entre, d’un côté, tel médecin, pharmacien ou associatio­n de patients et, de l’autre, une firme pharmaceut­ique. Il y a de plus en plus de généralist­es qui refusent de recevoir les visiteurs médicaux. Il y a aussi la possibilit­é pour les patients de déclarer eux-mêmes un effet indésirabl­e d’un traitement. Mais le problème est malheureus­ement toujours d’actualité. Et si, en France, certaines choses ont changé, au niveau européen, beaucoup moins.

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Le médecin Bruno Toussaint.

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