«En championnat, on s’en fout d’hier»
Pascal Martinot-Lagarde, médaillé de bronze, évoque les Mondiaux
Champion d’Europe en 2018, Pascal Martinot-Lagarde a confirmé au niveau planétaire, en arrachant la médaille de bronze sur 110 m haies, lors des Mondiaux de Doha. De retour en France, il raconte sa fierté et ses impressions sur cette compétition disputée dans des conditions atypiques.
Vous avez dit que cette médaille était au-dessus de tout. Pourquoi?
Elles ont toutes leur histoire, mais celle-là était la plus dure à obtenir. L’année dernière, c’était grandiose. Mais, dans ma discipline, les Européens ne sont pas forcément les meilleurs. Il fallait passer un cran au-dessus, c’est pour ça que j’en suis très fier. D’autant que vous restiez sur deux quatrièmes places au niveau mondial… Ça avait été très très dur à digérer. C’était deux blessures en attente de guérison. Ce bronze a fermé la plaie. Vous répondez toujours présent au moment où il faut. Avez-vous un secret pour ça? Ce qui est primordial, c’est d’être mort de faim. Je l’ai été, et je le suis toujours. Comme ça, on arrête de penser à tout ce qui pourrait nous servir d’excuses, une mauvaise préparation, des blessures, tout ça. Je suis arrivé au départ en me disant que le passé ne comptait pas. En championnat, on s’en fout d’hier. Certains n’y arrivent pas... C’est très personnel. On n’est pas tous égaux devant l’adrénaline. Soit elle te fige, soit elle t’envoie de la force. Ça se travaille, la « bonne » adrénaline. Moi, j’arrive souvent à sortir ma meilleure perf de l’année en championnat. Ça va me servir pour les JO. Quoi qu’il se passe avant, je me dirai que c’est possible.
Avez-vous ressenti une spirale négative autour du bilan négatif des Bleus ? Non, je n’y crois pas à ça. Les échecs des uns ne créent pas ceux des autres. On était soudés, tous les soirs, on se rassemblait pour encourager les potes. Mais, quand c’est à toi, tu es dans ton truc. Pendant mon échauffement, je ne ressentais pas la pression de devoir ouvrir le compteur des Bleus. Je cours pour moi, d’abord.
Qu’avez vous pensé des conditions particulières à Doha, entre le climat et le stade quasi vide?
On était tous logés à la même enseigne. On s’est peut-être trop posé de questions, et on a perdu de vue l’essentiel, qui est de courir. Après, pour les marathoniens et les marcheurs, ce n’était pas possible. Maintenant, on sait qu’on ne peut pas faire un championnat là-bas, au moins pour les épreuves longues. L’ADN d’un Mondial, c’est un stade rempli et une ambiance de malade. On ne l’a pas eue. Faire ces Mondiaux à Doha, ce n’était pas une décision prise pour les athlètes.