Un monde plus sûr ?
Donald Trump s’est félicité dimanche de la mort d’Abou Bakr al-Baghdadi, chef de Daesh. Ce succès ne garantit pas la fin du terrorisme islamiste.
Victoire ou simple étape? Dimanche, Donald Trump a annoncé en direct depuis la Maison-Blanche qu’Abou Bakr al-Baghdadi était mort à la suite d’une intervention de l’armée américaine dans le nord-ouest de la Syrie. «Le monde est maintenant bien plus sûr», s’est félicité le président des Etats-Unis au cours d’une allocution durant laquelle il a raconté en détail comment le leader de Daesh était «mort comme un chien».
Un coup «symbolique»
Symboliquement, il est clair que la disparition d’al-Baghdadi, proclamé calife en 2014, représente un coup dur pour l’organisation terroriste. « C’est une jolie marque pour la politique intérieure de Donald Trump, et cela va sûrement affaiblir Daesh le temps qu’[Al-Baghdadi] soit remplacé. Notamment les cellules dormantes de djihadistes qui attendent des ordres », commente auprès de 20 Minutes Amélie M. Chelly, chercheuse spécialiste de l’Islam idéologique et autrice du livre En attendant le paradis (éd. du Cerf). Il n’est cependant «pas certain qu’une telle perte symbolique affecte fondamentalement la direction opérationnelle de Daesh, depuis longtemps aux mains de professionnels aguerris», a déclaré à l’AFP JeanPierre Filiu, professeur à Sciences po. «Les grands chefs qui ordonnent les combats sont des anciens de l’armée irakienne et des Tchétchènes. Ils possèdent donc de grandes compétences stratégiques et des rôles décisionnaires, précise Amélie M. Chelly. Al-Baghdadi était l’incarnation d’une idéologie, mais sa disparition physique ne l’entache en rien. Elle ne va donc pas mourir avec lui, mais continuer de vivre.» Dans une série de tweets, Rita Katz, directrice de Site Intelligence Group, un groupe américain spécialisé dans la surveillance des mouvements djihadistes, évoque aussi le risque de représailles : «L’histoire nous a appris (à travers la mort d’al-Zarqawi et d’autres chefs) que le mouvement est résilient sur le plan opérationnel et va capitaliser sur la mort d’al-Baghdadi pour recruter et appeler à de nouvelles attaques», écrit-elle. D’autant que, en faisant exploser sa ceinture d’explosifs, ce dernier est mort en martyr, selon Daesh. Pour Amélie M. Chelly, certains pourraient décider d’agir sans attendre d’ordres : Daesh compte des « djihadistes en errance à qui le groupe Etat islamique a donné leur indépendance ». En 2014, son ancien porte-parole, Abou Mohamed al-Adnani, avait en effet exhorté les sympathisants de Daesh à tuer «de n’importe quelle manière», «tout citoyen» des pays entrés dans une coalition contre Daesh. Comment se déroulera la suite ? «Daesh n’a jamais identifié formellement ses cadres dirigeants, pour des raisons de sécurité», souligne Rita Katz. Une prudence que semblent partager plusieurs alliés occidentaux de Donald Trump. «Le combat continue avec nos partenaires (...) pour que l’organisation terroriste soit définitivement défaite », a réagi dimanche Emmanuel Macron.