Les aveux glaçants du «père Bernard»
Justice Ancien prêtre du diocèse de Lyon, Bernard Preynat est jugé depuis mardi pour agressions sexuelles sur mineurs
« Je n’ai jamais été attiré sexuellement par les femmes, ni par les hommes adultes. Uniquement par les petits garçons. » A la barre du tribunal correctionnel de Lyon, Bernard Preynat, 74 ans, ancien prêtre du diocèse de Lyon, poursuivi pour agressions sexuelles sur mineurs, le confesse : «Ce n’est pas facile de dire que l’on est un pédophile. » Il l’admet pourtant mardi lors de la première journée de son procès qui se tiendra jusqu’à la fin de la semaine.
Epaules voûtées, démarche fragile, l’homme à l’épaisse barbe blanche et à la voix posée et légèrement cassée ferait presque oublier qu’il est considéré comme l’un des plus grands prédateurs sexuels de France. Une image qui contraste avec celle du « chef d’orchestre » souvent décrit par ses victimes présumées. Combien ont été abusées par le « père Bernard » ? Les aveux glaçants du prévenu donnent le tournis. «De 1970 à 1991, c’est arrivé presque tous les week-ends. Un ou deux enfants à la fois ? Cela dépendait. Pendant les camps, cela pouvait être quatre ou cinq enfants par semaine », révèle-t-il. De quoi déclencher la stupéfaction du tribunal. «C’est presque un enfant par jour… pendant vingt ans », rebondit AnneSophie Martinet, présidente du tribunal correctionnel.
«Je ne me rendais pas compte»
Dix, pour lesquels les faits ne sont pas prescrits, ont droit à un procès. Parmi eux, Pierre-Emmanuel Germain-Thill, abusé pour la première fois à l’âge de 10 ans en 1989. Scout à la paroisse Saint-Luc de Sainte-Foy-lès-Lyon, enfant de choeur et élève au collège de la Favorite dans lequel Bernard Preynat était aumônier, le garçon « cumulait » les occasions de se trouver seul, enfermé avec le curé. « A chaque fois que j’étais désigné enfant de choeur, je savais que j’allais y passer », lâchet-il dignement. « Ces gestes étaient de plus en plus appuyés, se souvient-il. Il me caressait le sexe d’un mouvement circulaire de la main.» Au total, une « cinquantaine de fois » en quasiment trois ans, évoque le jeune homme. Ce que conteste l’ancien prêtre. « Non, pas autant. Une quinzaine de fois, peut-être. Mais je dirais une dizaine », répond-il, déclenchant l’agacement du parquet. « Monsieur Preynat, il y a déjà une différence entre 10 et 15. Je vous rappelle que vous risquez dix ans de prison pour une seule fois », le tance Dominique Sauve, la vice-procureure, se lançant dans un bras de fer avec le prévenu, qui conteste progressivement les faits qu’il a reconnus en garde à vue.
«Je ne me rendais pas compte de la gravité de mes actes. Je savais que c’était interdit et condamnable mais je ne pensais pas aux conséquences que cela aurait pour mes victimes », plaide Bernard Preynat, reconnaissant toutefois que « cela [lui] procurait du plaisir sexuel ». Les débats doivent reprendre ce mercredi.