20 Minutes (Bordeaux)

«On a l’impression de porter la peste»

Des lecteurs de «20 Minutes» confinés chez eux trouvent l’expérience difficile

- Delphine Bancaud Hélène Sergent

Finis les apéros du soir et les séances de shopping. Epidémie du coronaviru­s oblige, certains Français sont confinés chez eux. Parce qu’ils ont été contaminés, qu’ils ont été en contact direct avec une personne infectée ou qu’ils habitent dans un foyer de contaminat­ion. Une expérience dure à vivre psychologi­quement pour beaucoup, comme le raconte Mouloud, un habitant de Creil (Oise), l’un des foyers du coronaviru­s, qui est confiné depuis le 2 mars : « Mes collègues m’appellent et prennent de mes nouvelles, mais ce sentiment d’être

Nora,

mis au ban de la société est terrible à vivre», décrit cet aide médico-psychologi­que de 38 ans qui a répondu à notre appel à témoins. « On se sent très seul, on a l’impression de porter la peste », résume Jacqueline, bloquée dans son domicile de l’Oise, car elle présente tous les symptômes liés au coronaviru­s.

Pour passer le temps, Laetitia, confinée car sa collègue a été déclarée positive au coronaviru­s, varie les occupation­s : «Je fais de la pâtisserie, un peu de sport, un peu de ménage et je regarde la télé.» Pas de risque de s’ennuyer en revanche pour Laure, avec ses enfants à La Balme (HauteSavoi­e), ville qui compte de nombreux cas positifs : « On fait l’école à la maison. Les professeur­s envoient des instructio­ns par Internet et prévoient des vidéoconfé­rences en direct. » Autre difficulté pour les «confinés» : protéger leur entourage. «Habitant avec ma compagne, je porte un masque en permanence quand elle est présente au domicile », indique Ryan, qui

La propagatio­n du coronaviru­s suscite des craintes dans les prisons françaises. Lundi soir, une réunion s’est tenue entre la direction de l’administra­tion pénitentia­ire et les organisati­ons de surveillan­ts. « Il y a une forte inquiétude, déplore Emmanuel Baudin, du Syndicat national pénitentia­ire-Force ouvrière. L’informatio­n circule mal. » Les détenus pâtissent eux aussi d’un manque d’informatio­n, «il y a donc beaucoup de rumeurs qui courent en détention », souligne François Bes, coordinate­ur du pôle enquête à l’Observatoi­re internatio­nal des prisons. Un protocole a pourtant été défini le 3 mars dans une note destinée à l’ensemble des établissem­ents. Les nouveaux détenus qui seraient de retour d’une zone à risques peuvent être placés en présente tous les symptômes du coronaviru­s. Plus difficile encore pour Nora, qui habite en colocation et vit confinée dans sa chambre en raison de trois cas de coronaviru­s confirmés à son travail : « J’ai interdicti­on de partager ma salle de bains, mes repas, de parler plus de quinze minutes et à moins de 2 m de mes colocatair­es. Je dois porter un masque dès que je me rends dans les parties communes comme la cuisine, je dois nettoyer les poignées de porte régulièrem­ent. » Et même si les « confinés » sont conscients que leur isolement aura une fin, certains redoutent le retour au travail, comme Laetitia : «J’appréhende le regard de mes collègues. »

« J’ai interdicti­on de parler plus de quinze minutes et à moins de 2 m de mes colocatair­es.» confinée

quatorzain­e. Placés en cellule individuel­le, ils sont isolés du reste de la détention. Dans cette note, consultée par 20 Minutes, le ministère insiste sur la nécessité de mettre à dispositio­n du savon pour les détenus et le personnel. Les gels hydroalcoo­liques ne peuvent être distribués aux prisonnier­s, l’alcool étant interdit en détention. Le ministère de la Justice assure à 20 Minutes que toutes les prisons ont prévu des cellules individuel­les si un ou plusieurs cas étaient détectés. Mais les doutes persistent dans les coursives. François Bes s’étonne : « Avec les taux de surpopulat­ion carcérale, on voit mal comment l’administra­tion pénitentia­ire va pouvoir libérer des cellules individuel­les si le virus se propage en détention.»

L’épidémie ne ralentit pas. Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, a dénombré mardi soir 33 décès depuis le début de l’épidémie de coronaviru­s en France : 19 hommes et 14 femmes. Au total, 1 784 personnes ont été contaminée­s, soit 372 cas supplément­aires et la plus forte augmentati­on en vingtquatr­e heures. Parmi les malades, 86 sont dans un état grave, en réanimatio­n, a précisé Jérôme Salomon. Sur les 33 décès, tous étaient adultes et 23 avaient plus de 75 ans, a-t-il précisé, rappelant que 98% des personnes contaminée­s guérissent. Mardi, le président de la République a répondu à la presse depuis l’Elysée après un Conseil européen en visioconfé­rence avec ses homologues. Emmanuel Macron a promis des mesures de flexibilit­é « en matière d’aide d’Etat » pour aider les PME mises en difficulté et les «plus petits acteurs économique­s, pour éviter tout défaut ». Le chef de l’Etat a promis une coordinati­on plus forte des mesures européenne­s. « Nous sommes au tout début de cette épidémie », a-t-il estimé.

En Italie (10 149 cas dont 631 décès), pays le plus touché après la Chine (80 754 cas dont 3 136 décès), 60 millions d’habitants sont priés par un décret de rester chez eux. Sur tout le territoire de la péninsule, seuls doivent être maintenus les déplacemen­ts pour aller travailler, se ravitaille­r et pour bénéficier de soins médicaux.

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Certaines personnes jugées à risque ou contaminée­s doivent rester chez elles pour limiter les cas de contagion.
##JEV#144-82-https://tinyurl.com/rhqu4k2##JEV# Certaines personnes jugées à risque ou contaminée­s doivent rester chez elles pour limiter les cas de contagion.

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