Voies de réflexion
Entre incertitudes liées à la crise et nécessité de relancer la machine économique, le secteur des transports tente de regarder droit devant.
Au vu des résultats de l’enquête de l’observatoire de la mobilité 2020, certains opérateurs de transports, comme Kéolis, craignent que la crise du Covid-19 renforce l’utilisation de la voiture individuelle. En effet, il ressort de cette étude que « 31 % des voyageurs comptent délaisser partiellement ou totalement le transport public et se reporteraient à 29 % sur les modes actifs (marche, vélo…) et / ou la voiture individuelle (16 %). »
« On a tout intérêt à ce que le report modal vers la marche et vélo demeure, parce qu’il est vertueux pour la ville et pour les transports, analyse Aurélien Braud, directeur marketing de Keolis Bordeaux Métropole. En revanche, il y a un vrai risque de congestion sur les routes à la sortie de la crise. C’est un gros enjeu pour la métropole. » Selon lui, il sera donc primordial de maintenir une offre de transports qualitative. « Il ne faut surtout pas abaisser l’offre, sous prétexte qu’il y a actuellement 40 % de trafic en moins, exhorte Aurélien Braud. Il reviendra avec l’offre, et il faudra poursuivre les projets de transports pour continuer de favoriser le report modal. »
L’incertitude du télétravail
Malgré les contraintes financières, les élus assurent qu’ils ne dégraderont pas cette offre. « Il est évident que c’est en proposant des transports performants et adaptés que la clientèle reviendra », abonde Béatrice de François, vice-présidente de Bordeaux métropole, chargée des transports. D’autant plus, anticipe Aurélien Braud, que « les usagers n’accepteront plus de voyager dans les conditions qu’ils acceptaient auparavant, notamment en termes de fréquentation. » Reste à savoir d’ici combien de temps le réseau de Bordeaux métropole retrouvera son niveau d’avant crise, qui avait atteint 179 millions de voyages en 2019. « Même quand tout redeviendra normal, il faudra plusieurs mois, voire une année, pour retrouver une bonne partie de la fréquentation du réseau », estime Aurélien Braud. « Et tous les clients qu’on a perdus ne reviendront pas, prévient-il, même si, à terme, le volume du trafic atteint son niveau d’avant, et même le dépasse, car la métropole va continuer de grandir. » Pour Béatrice de François, « la baisse de fréquentation est surtout due aux étudiants qui ne vont plus en cours et aux télétravailleurs. » « Nos grandes interrogations reposent sur le télétravail : va-t-il continuer ? Si oui, à quel niveau ? Nous n’avons pas ces réponses pour le moment. »
« Et il y a un facteur encore plus embêtant pour nous, ajoute le directeur marketing de Keolis Bordeaux. C’est cette défiance un peu irrationnelle envers les transports en commun. On n’y a jamais détecté de clusters, pour la simple raison que c’est régulièrement aéré, et qu’il y a un très fort taux du port du masque. »