20 Minutes (Bordeaux)

Le déni levé par les leviers d’une série?

L’histoire de Tiff, l’héroïne de la septième saison, met en lumière le déni de grossesse, un phénomène méconnu chez les ados

- Clément Rodriguez

Depuis trois ans, Skam France s’attache à dépeindre les enjeux de la jeune génération. Dans la septième saison, lancée en janvier, la série plonge ses fans dans le quotidien d’une adolescent­e ayant fait un déni de grossesse total : Tiffany n’avait aucun symptôme, et donc aucune possibilit­é de savoir qu’elle donnerait naissance à un enfant après une compétitio­n sportive.

Cette expérience est celle d’environ 1 500 à 3 000 femmes chaque année en France, dont 330 font un déni total et accouchent sans jamais avoir su qu’elles étaient enceintes. Un phénomène qui peut arriver à n’importe qui, quel que soit le milieu ou l’âge. Pour l’éviter, suffit-il de mettre le déni de grossesse en lumière à travers le prisme de la fiction ? «Le déni de grossesse ne peut être levé que par quelqu’un de l’extérieur, répond d’emblée Pauline Minjollet, docteure en psychologi­e. Il faut qu’une personne fasse une remarque, ça ne peut pas venir de la fille elle-même. » Ainsi, même si Skam permet d’attirer l’attention sur une problémati­que que les ados connaissen­t très peu, voire pas du tout, le fait d’en faire le thème de cette saison ne permettrai­t pas de diminuer le nombre de personnes touchées. « Une jeune fille qui va faire un déni de grossesse ne va pas pour autant l’éviter quand elle sait ce que c’est, précise Pauline Minjollet. C’est un fonctionne­ment inconscien­t. » En revanche, on pourrait dire que, plus on parle du déni de grossesse, mieux on le prend en charge et mieux on le dépiste. En mettant le sujet au coeur de sa dernière saison, Skam enclenche un processus de sensibilis­ation qui peut aider les adolescent­s et adolescent­es concernées de près ou de loin par le déni de grossesse. «Les adolescent­s ont toujours peur d’être stigmatisé­s et ça peut aider, note Pauline Minjollet. Si une fille fait un déni de grossesse et que son entourage sait ce que c’est, il peut mieux la soutenir. » Peu traitée dans le cadre des fictions du petit ou du grand écran, cette thématique est pourtant une porte d’entrée pour aborder avec un public jeune la question de la grossesse de manière générale. «C’est fini l’époque où on allait dans les lycées faire de l’éducation sexuelle, relève la docteure en psychologi­e. La fiction permet d’innover et de mieux cibler l’intérêt des ados. » Enfin, la série est aussi l’occasion d’aborder la question d’une façon plus positive, à l’inverse d’un téléfilm comme L’Enfant que je n’attendais pas, diffusé sur France 2 en 2019, qui peignait le portrait d’une femme qui se débarrasse du bébé non attendu et qui finit par être accusée d’infanticid­e. Une mise en valeur d’un drame qui ne concerne qu’un pour cent des dénis de grossesse.

«Le déni de grossesse ne peut être levé que par quelqu’un de l’extérieur. » Pauline Minjollet, docteure en psychologi­e

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Tiff, au côté de Max, accouche sans savoir qu’elle était enceinte.

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