« La fiction est la glu de la société »
Le romancier était l’invité d’une conférence organisée par « 20 Minutes »
Dans sa trilogie des Falsificateurs (Gallimard), une société secrète travaille à modifier la réalité. Le romancier Antoine Bello était l’un des invités de la conférence Vis(i)ons 2018, organisée par 20 Minutes, mardi. L’occasion de l’interroger sur son approche du vrai et du faux.
En tant qu’écrivain, vous travaillez sur le faux. Pourtant, vous êtes un fervent défenseur de Wikipédia. Pouvez-vous expliquer ce paradoxe ?
Ma technique littéraire consiste à approcher la vérité par le biais de la falsification. J’interroge la frontière entre le vrai, le vraisemblable et le faux. J’adore quand les lecteurs me disent qu’ils sont allés vérifier sur Wikipédia tel ou tel fait évoqué dans l’un de mes livres. C’est l’attitude que nous devrions tous avoir par rapport à l’information.
Vous cédez d’ailleurs vos droits d’auteur à la Wikimedia Foundation. En août, vous avez promis de doubler les dons de vos lecteurs à Wikipédia. Cela a-t-il marché ?
Wikipédia permet d’accéder à une forme de vérité très intéressante. L’identification des faits par rapport à l’opinion est l’une des pistes d’avenir du journalisme. Aux Etats-Unis, beaucoup de donateurs ont profité de mon opération, ce qui porte le total à 120 000 $ (101 765 €). Wikipédia est pour moi un service public, universel.
Lors de Vis(i)ons, vous avez dit : « Si je devais créer des androïdes (…) je les doterais de mythes et de récits fondateurs puissants. » Le mensonge comme liant social, vraiment ?
La fiction est la glu de la société. Les souvenirs personnels permettent de développer la notion d’individualité. A un autre niveau, nous avons besoin de mythes. Nous stockons des histoires, qui deviennent des moyens mnémotechniques de retenir les faits. Le plus important est de se rendre compte de la part de recréation et d’interprétation dans ces histoires.