Le hip-hop à Pleyel pour assurer dans les prisons
L’association Fu-Jo, qui organise des concerts en prison, fête ses 10 ans à la Salle Pleyel
Il y a dix ans, Mouloud Mansouri se lance dans un projet fou : organiser des concerts avec des artistes de renom dans les prisons. Pour mener à bien cette idée, il crée l’association Fu-Jo. Pari réussi. Mardi, le concert Hip-Hop Convict animera pendant plus de trois heures la Salle Pleyel à Paris*, avec notamment les rappeurs Nekfeu, S-Crew, Dinos, Georgio ou Cut Killer, pour fêter les dix ans de l’association. Tous les bénéfices de la soirée lui seront reversés.
« Une journée de liberté »
Fu-Jo fête ses 10 ans, mais le challenge est né il y a un peu plus longtemps que cela. Mouloud Mansouri, alors détenu pour trafic de stupéfiants depuis près de dix ans, constate un manque d’activités culturelles « de qualité ». Il change de prison plusieurs fois, et chaque directeur lui refuse son projet de faire venir des rappeurs en prison. Le directeur du dernier établissement par lequel passe Mouloud Mansouri accepte, et six concerts sont organisés. Le jeune homme quitte ensuite la prison, sous sortie conditionnelle. Mais ses anciens « collègues réclament de nouveaux concerts ». Pour motiver les artistes, l’ex-taulard insiste sur le fait que les directeurs de prison « ne pensent pas au kif des détenus. Pour eux, une journée de concert, c’est une journée de liberté. » Oxmo Puccino, Zaz, IAM, Diam’s… Au total, plus de 150 artistes ont participé aux concerts de Mouloud Mansouri.
Tout n’est pas rose pour autant. « Depuis le mandat de François Hollande, on rencontre de plus en plus de contraintes, s’agace Mouloud Mansouri. Les autorités vérifient davantage, veulent lire les textes avant les concerts, connaître les artistes. » Leur album, Shtar Academy, sorti en 2014, leur a permis de gagner en notoriété, mais pas suffisamment du côté des institutions. « Aujourd’hui, j’attends qu’on soit soutenu et que les choses se facilitent, car elles évoluent peu et régressent souvent », poursuit-il. Le bilan de ces dix dernières années est toutefois positif pour l’ancien détenu. « On a poussé, on a fait un album, 300 concerts et des activités organisées en prison, se réjouit Mouloud Mansouri. J’aimerais bien préparer des détenus pour qu’ils puissent faire des premières parties de concert. Mais là, le gros projet qui arrive est celui de mardi. On va faire le premier concert de rap de la Salle Pleyel. Chez les riches ! »