Les secrets de longévité de Jean-Pierre Pernaut
La sémiologue analyse le succès, depuis 30 ans, du JT de Jean-Pierre Pernaut
Trente ans. Ça fait trente ans que Jean-Pierre Pernaut présente la « petite messe » de l’info, tous les jours de la semaine sur TF1 à 13 h, et toujours avec le même succès. En 2002, la philosophe Catherine Clément analysait ce succès dans un rapport sur la place de la culture à la télévision. Catherine Roberti, sémiologue et spécialiste des médias à l’université de Liévin, a repris une partie de ce travail et analysé les particularités du programme.
Qu’est-ce qui fait la longévité de Jean-Pierre Pernaut au « 13 Heures » sur TF1 ?
La force de l’habitude est très puissante à la télévision, surtout pour des rendez-vous institutionnels comme les JT. Les téléspectateurs réclament l’absence de changement. Le secret de la longévité de ce JT, c’est de savoir ne jamais rien changer.
Ce programme est-il conservateur ?
Dans la forme, infiniment. Et c’est précisément ce qui plaît. Dans un monde et une époque où le mode de consommation des informations a été bouleversé, ce programme est une balise.
Cette continuité passe-t-elle surtout par la figure de son présentateur ?
Oui mais pas seulement. La forme de ce JT est immuable à un point qu’on ne soupçonne pas. La durée et la construction des sujets sont absolument invariables. Le ton également, et même le vocabulaire.
Jean-Pierre Pernaut laisse parfois transparaître son opinion personnelle, plutôt conservatrice…
Ou carrément réactionnaire ! Oui, c’est vrai et ce n’est pourtant pas un frein à son succès. Cela ne signifie pas que ses téléspectateurs partagent ses vues. Mais il a été démontré que les consommateurs d’informations adhèrent plus facilement à un journal télévisé si le présentateur ou la présentatrice apparaît comme quelqu’un de clivant. Ça peut sembler paradoxal, mais une incarnation qui se veut neutre de l’information est perçue comme suspecte. ■