« Ils attendent quoi, qu’un arbitre meure? »
L’arbitre a été violemment agressé lors d’un match amateur
Malgré la fatigue et la douleur, Yassine Sahli se prête au jeu du marathon médiatique. « Pour la bonne cause, explique-t-il, pour dénoncer les violences du football amateur. » Arbitre en 4e division de district, il a été victime, dimanche, d’une agression lors d’un match entre Vertle-Grand (Essonne) et le Racing Club arpajonais. Roué de coups, notamment par le président de Vert-le-Grand, il a décidé de porter plainte et de mettre un terme à sa carrière.
Comment allez-vous ?
Question douleurs, je vais mieux. Le souci est psychologique, je n’arrive pas à dormir. Mon cerveau m’en empêche, il m’alerte en me disant que des gens veulent me frapper.
En répondant à de nombreux médias, vous pensez que vous avez désormais un rôle à jouer ?
Moi, si je réponds à beaucoup de personnes, c’est pour faire avancer les choses. Ils attendent quoi, qu’un arbitre meure ? Il y a un fossé entre l’arbitrage pro et ceux qui sont tout en bas. Il faut faire quelque chose, on n’est pas en sécurité. Moi, j’ai décidé d’arrêter.
Si on vous avait dit il y a deux ans que quelque chose comme ça allait arriver, vous l’auriez cru ?
Je savais que ça allait arriver. Je ne savais pas quand, mais je le savais. J’ai déjà été insulté, intimidé… Mais me porter des coups, je n’y aurais pas cru à 100 %. Je ne pensais pas qu’un joueur pourrait porter un coup. Je pensais que l’arbitre, c’était comme un policier, ça faisait peur. Maintenant, on nous défie.
C’est comme ça tous les week-ends ?
J’ai envoyé, il y a quinze jours, une lettre ouverte au district, disant que, sur la quinzaine de matchs que j’ai arbitrés, il y en a au moins dix où je me suis fait insulter ou intimider. J’ai dû sortir 15 cartons rouges, j’ai arrêté un match… C’est ça tous les jours. On ne prend pas de plaisir en se faisant insulter.
La violence dans le foot amateur est un problème chronique en France…
Si vous saviez… Même des joueurs de la même équipe s’insultent et se battent. Si j’applique le règlement, c’est rouge aux deux. Mais si je le fais, ça part en cacahuète. En amateurs, les arbitres ont le cul entre deux chaises : d’un côté le règlement, de l’autre les joueurs. Le juste milieu, on ne peut pas le trouver…
Pensez-vous que la façon dont l’arbitre est traité et discuté dans les médias se reflète en amateurs ?
A 100 %. En amateurs, les joueurs ne respectent pas du tout l’arbitre. Si des joueurs intimident l’arbitre en L1, ça se répercute en amateurs.
Que pourrait-on faire ?
Faire une loi sur l’arbitrage, pour que l’arbitre soit considéré comme une personne dépositaire de l’autorité publique. Si on risque gros en touchant l’arbitre, les violences baisseront. Tant qu’il n’y aura pas quelque chose comme ça, on aura d’autres incidents de ce genre.