Beaucoup de coups tordus
L’envahissement de la pelouse témoigne d’une exaspération
«Je comprends la déception des supporters, mais la maîtrise des émotions est prioritaire. Cette méthode conduira directement au chaos. » Depuis qu’il a vendu le Losc, Michel Seydoux s’exprime peu. L’ex-président du club est pourtant intervenu sur Twitter, dimanche, pour condamner les débordements qui se sont déroulés la veille au stade Pierre-Mauroy : une centaine de supporters lillois a envahi la pelouse, à la fin du match contre Montpellier, en tentant de frapper quelques-uns de ses joueurs et en insultant la direction.
« On était patient depuis le début de la saison, mais à un moment… »
William, supporter du Losc
Un comportement inexcusable et injustifiable qui révèle l’exaspération de fans dont le club est actuellement 19e de L1 et menacé de relégation administrative. « La cocotte-minute a explosé, résume François Stock, président des Dogues du Net, une association de supporters. Ce sont des actes de colère, de dépit que je regrette et que je condamne. Les supporters sont mécontents, mais, sur la forme, c’est triste. » Dimanche, un communiqué des ultras Dogues virage sst (DVE) revendiquait les débordements mais ne cautionnait pas « les très rares violences isolées ».
En début de semaine, une rencontre entre Gérard Lopez – qui a racheté le club en janvier 2017 avec l’objectif d’en faire une machine à cash en misant sur la progression et la vente de jeunes joueurs – et les associations de supporters s’était pourtant conclue sur une « union sacrée » jusqu’à la fin de la saison. Mais les supporters lillois évoquent un profond sentiment de frustration. Leur équipe s’est transformée en un fonds d’investissement. « Notre club se construit depuis vingt ans et Lopez a marché sur ses valeurs en dix-huit mois, explique William, un autre supporter. Toutes les actions menées sont en train de tuer notre club. C’est facile de taper sur les supporters, mais on n’est pas responsable de la situation. On était patient depuis le début de la saison, mais au bout d’un moment… On n’est pas d’accord avec la violence, mais on ne peut pas blâmer ceux qui y ont eu recours. » Si Lopez cristallise autant les rancoeurs, pourquoi s’en prendre aux joueurs? Depuis le début de la saison, ces derniers se sont éloignés des supporters. Perçus comme des actifs par leurs dirigeants, ils ont du mal à incarner l’identité du club auprès des supporters. « On ne sent pas les joueurs concernés, ils n’arrivent pas à jouer ensemble, ajoute William. C’est comme si t’allais voir Calogero en concert et qu’au début, il disait : “Aujourd’hui, j’ai pas envie de jouer, mais merci pour l’argent.” » Mais on a rarement vu des émeutes aux concerts de Calogero. ■