20 Minutes (Lille)

« L’intelligen­ce artificiel­le peut détecter ce qu’un médecin ne verrait pas »

Le scientifiq­ue évoque le futur de l’intelligen­ce artificiel­le

- Propos recueillis par Laure Beaudonnet

Après Zurich, Google a choisi Paris pour installer son deuxième laboratoir­e européen sur l’intelligen­ce artificiel­le (IA). Olivier Bousquet, responsabl­e de la recherche en machine learning du laboratoir­e suisse, est chargé de monter le projet dans la nouvelle place forte pour l’IA, qui accueille déjà Facebook AI Research.

Quelles applicatio­ns de l’IA devrait-on voir arriver très vite ?

L’IA va avoir un gros impact sur la santé. Il y a beaucoup de notes écrites à la main par les médecins qui ne sont pas traitées, comme la réaction qu’un patient a pu faire à un médicament il y a des années. Si on arrive à structurer ces données, à les mettre dans un ordinateur, on va pouvoir faire des recherches très rapidement, et éviter certaines erreurs. Mais l’une des applicatio­ns les plus immédiates concerne tout ce qui est à base d’images, typiquemen­t celles du fond de la rétine. On a pris des photos de la rétine de milliers de gens et elles ont été classifiée­s par un système d’IA. La machine peut détecter des signes qu’un médecin ne pourrait pas voir à l’oeil nu, comme ceux de la cécité chez un diabétique.

L’IA sera-t-elle capable un jour de parler comme un humain ?

Dans l’histoire de l’IA, on a eu beaucoup de déconvenue­s, en particulie­r sur la capacité des ordinateur­s à converser avec les humains. Mais ça reste envisageab­le dans la mesure où l’on peut déjà avoir des ordinateur­s qui comprennen­t, de façon très limitée et très superficie­lle, le langage naturel. La compréhens­ion actuelle consiste à repérer des motifs dans les phrases. Comparons les phrases “Je pose cette bouteille sur la table” et “Je pose cette bouteille sur le ciel”. La machine va repérer qu’après “posé sur”, on n’utilise pas le ciel, mais la table. Cela ne veut pas dire qu’elle a une représenta­tion de ce qu’est une table. Pour converser de façon naturelle, il faut développer une technologi­e qui a accès à plus d’informatio­ns que des motifs statistiqu­es dans du texte.

Comment fait-on ?

Les enfants, on leur parle et, en même temps, ils évoluent dans le monde, ils interagiss­ent. C’est ce qu’il faudrait reproduire pour arriver à une machine capable de faire le lien entre le texte et le sens de ce texte. On n’a pas fait des avions en imitant les oiseaux. Même si l’on utilise des réseaux de neurones, quand on fait du machine learning, on fait de l’identifica­tion plutôt que de l’apprentiss­age au sens biologique.

Que répondez-vous à Elon Musk et Stephen Hawking qui mettent en garde contre les dangers de l’IA ?

A court terme, il faut voir l’IA comme un outil dont on a le contrôle, plutôt que comme une entité autonome. L’IA soulève un tas de problèmes beaucoup plus concrets que celui des robots-tueurs. Ces technologi­es s’appuient sur des données. Si les données sont biaisées, le résultat va être biaisé. ■

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Olivier Bousquet monte le laboratoir­e parisien de Google sur l’IA.

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