L’Etat prend dette
A partir de 2020, l’Etat devra reprendre, en partie, la dette de SNCF Réseaux, évaluée à 46,6 milliards d’euros. Un vrai casse-tête pour le gouvernement.
Emmanuel Macron n’est pas le seul à avoir été chahuté mercredi. Alors que le chef de l’Etat faisait face à des cheminots plus que mécontents dans les Vosges, les représentants de l’Etat et de la SNCF ont dû affronter les questions pointues des députés sur la dette de SNCF Réseau. Evaluée à 46,6 milliards d’euros, elle doit être reprise en partie par l’Etat à partir de 2020.
Mais les élus des groupes minoritaires à l’Assemblée nationale estiment que les conditions de cette reprise sont trop floues. Selon Martin Vial, commissaire de l’Agence des participations de l’Etat (APE), il faut attendre que la SNCF précise sa nouvelle trajectoire financière (augmentation des recettes et/ou réduction des coûts) avant d’apporter plus de précisions.
« Double peine »
Si les représentants de l’Etat sont aussi prudents, c’est parce que le sujet est politiquement inflammable. « Si l’Etat reprend la dette aujourd’hui, il a une double peine, décrypte Marc Ivaldi, professeur à la Toulouse School of Economics. D’abord, cela fera repasser le déficit public au-dessus des 3 % de PIB, alors que la France vient tout juste de passer en dessous (2,6 % en 2017). Ensuite, cela fera aussi mécaniquement augmenter la dette. Alors que tous les pays européens bénéficient de la reprise économique, cela donnerait l’impression que la France est un mauvais élève.» En pleine « campagne » pour l’Europe, Emmanuel Macron se passerait volontiers de cette image.
Reste un point soulevé mercredi : y a-t-il une dette cachée? Pour le centriste Charles de Courson, il existe une « dette grise » de 9 milliards d’euros, qui correspondrait aux futurs déficits des lignes LGV dont les recettes auraient été surestimées. En intégrant cette somme, la dette de SNCF Réseau bondirait au-dessus des 50 milliards d’euros.
« Il n’y a pas de dette grise » lui a aussitôt répondu Patrick Jeantet, le PDG de SNCF Réseau. «Ce que montre ce débat autour d’une supposée “dette grise”, c’est la non-transparence du système actuel, conclut Marc Ivaldi. Aujourd’hui, il y a trop peu de contrôle et d’autorégulation. »