20 Minutes (Lille)

Les braconneur­s de chardonner­ets poursuivis

La région est très touchée par le braconnage d’oiseaux protégés

- Mikaël Libert

Les Hauts-de-France ne sont pas épargnés par le trafic d’animaux sauvages. Jeudi, un homme devait comparaîtr­e devant le tribunal correction­nel de Lille pour « enlèvement ou capture d’espèce animale protégée ». En l’occurrence, des chardonner­ets élégants. Une affaire qui lève le voile sur une pratique très répandue dans la région.

Le 21 janvier 2017, près de la gare Saint-Sauveur, à Lille, un homme d’une cinquantai­ne d’années a été interpellé par des agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Dans la besace de l’individu, les fonctionna­ires ont découvert deux chardonner­ets élégants, des petits oiseaux protégés. Lors de ses auditions, « mon client a reconnu qu’il braconnait. Comme son grand-père et son père avant lui », a déclaré l’avocat du suspect, maître Bironneau. Pour autant, le mis en cause a affirmé qu’il ne faisait pas commerce de ces oiseaux.

Une tradition issue de la mine

« Pour cette affaire, je ne me prononce pas. Mais c’est toujours ce que disent les braconnier­s qui se font attraper, réagit Bertrand Warnez, de l’ONCFS du Nord. Il faut savoir que le prix de certains chardonner­ets va de 30 à plusieurs centaines d’euros sur le marché. » En 2017, le tribunal de Lille a vu passer une quarantain­e de prévenus accusés de trafic d’oiseaux protégés : « En deux ans, nous avons saisi environ 600 oiseaux. Le Nord et le Pas-de-Calais font partie des départemen­ts les plus touchés par ce trafic », assure Jean-Michel Vasseur, un autre agent de l’ONCFS. Plusieurs raisons à cela : « C’est une tradition qui vient de la mine, quand les mineurs descendaie­nt avec des canaris pour détecter le grisou. Ça a évolué en concours de chant et de beauté. Le début du braconnage vient d’une déviance à croiser les canaris avec des espèces sauvages », explique l’agent.

La région se trouve aussi sur les voies de migration des oiseaux et elle regorge de friches dans lesquelles ils trouvent leur nourriture. « On sait très bien que la friche SaintSauve­ur renferme de nombreuses espèces protégées, prévient l’écologiste Lillois Dominique Plancke. Si les braconnier­s ne viennent pas à bout des chardonner­ets, c’est l’urbanisati­on qui le fera de toute façon », déplore-t-il. Le procès de l’homme a été reporté à mars 2019 en raison de pièces manquantes au dos- sier, notamment une expertise des oiseaux saisis. « Il encourt deux ans de prison et 150 000 € d’amende », selon l’ONCFS. Dans les faits, les peines sont assez faibles : « Entre 400 et 600€ en compositio­n pénale. Beaucoup recommence­nt, ça prouve bien que c’est rentable », soupire Jean-Michel Vasseur.

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Un chardonner­et élégant saisi par les agents de l’ONCFS du Nord.

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