20 Minutes (Lille)

« Le mouvement n’est pas partisan, mais très politique

« Gilets jaunes » Chercheuse à Bordeaux, Magali Della Sudda analyse le mouvement, de sa sociologie à ses revendicat­ions

- Propos recueillis par Elsa Provenzano

Qui sont les « gilets jaunes » mobilisés depuis le 17 novembre partout en France ? Afin de mieux cerner le mouvement social, des chercheurs en sciences humaines réalisent une étude. Parmi eux, Magali Della Sudda, du centre EmileDurkh­eim, rattaché à Sciences po Bordeaux. Elle qui participe aux enquêtes de terrain – toujours en cours – commente pour 20 Minutes les premières données récoltées.

D’où part l’idée de vous intéresser au mouvement des « gilets jaunes » et quelle méthodolog­ie adoptez-vous pour l’analyser ?

On s’est dit que les chercheurs devaient rendre compte le plus fidèlement possible de ce mouvement, de sa sociologie, de ses revendicat­ions et de ses transforma­tions. Ainsi, 80 chercheurs sont mobilisés sur cette enquête, aidés par des étudiants et des enseignant­s-chercheurs actifs ou à la retraite. On diffuse des questionna­ires sur les ronds-points et lors des manifestat­ions. Ils sont rédigés sous forme de questions ouvertes afin de ne pas imposer de réponses. Ce sont de petits entretiens.

Une majorité de sondés se retrouvent autour du sujet du pouvoir d’achat...

Beaucoup sont préoccupés par le pouvoir d’achat, le leur, mais aussi celui des autres. Il y a une revendicat­ion de justice sociale. Très vite, on a eu des gens qui ne cochaient plus la case « Je suis là pour protester contre la hausse des taxes sur les carburants ». C’est la France des « petits moyens », si je reprends l’expression de collègues qui ont travaillé sur la banlieue pavillonna­ire et ses habitants, ceux qui peuvent juste se permettre d’être propriétai­res, mais pas dans les grandes villes.

Il ressort aussi de l’enquête une demande très politique de réforme des institutio­ns...

Le mouvement des « gilets jaunes » n’est pas partisan, mais très politique. Il y a un désir de réforme institutio­nnelle, assez unanimemen­t partagé.

Cette demande d’une réforme démocratiq­ue a une dimension très politique, au sens originel du terme.

Sur les ronds-points, avez-vous observé une sociabilit­é entre les « gilets jaunes » ?

Oui, cela remonte des observatio­ns de terrain. Il y a de la solidarité. C’est important de le souligner car, si on s’en tient aux violences qu’on voit à la télévision, on ne peut pas comprendre ce mouvement. La « casse » est condamnée. Ainsi, 89 % des sondés répondent qu’ils ne pourraient y avoir recours.

« Le mouvement n’est pas partisan, mais très politique. »

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Pour 89% des sondés, le recours à la « casse » n’est pas envisageab­le.

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