L’Indian Super League a bien perdu de sa superbe
Lors de son lancement en 2014, le championnat indien avait attiré de grands noms. Mais leur départ a fait baisser le niveau général
L’Indian Super League (ISL) a perdu de sa superbe. Il y a cinq ans, cette ligue fermée (composée aujourd’hui de dix équipes) se targuait d’un onze-type de stars : James, Zambrotta, Nesta, Lucio, Roberto Carlos, Sissoko, Malouda, Pirès, Del Piero, Trezeguet, Anelka. Aujourd’hui, ces noms ronflants ont laissé la place à Ogbeche (ex-PSG), Uche (ex-Bordeaux), Sogou (ex-OM) et Machado (ex-TFC). Il faut bien se mouiller la nuque dans le Gange pour comprendre comment les projecteurs ont pu se détourner si vite de l’ISL. Tout d’abord, en Inde, le foot se heurte à une institution : le cricket. « La différence entre les deux sports est immense, affirme Akash Khanna, journaliste sportif à NDTV. Ici, les enfants ont une batte de cricket avant d’avoir un ballon de foot.» Différence de popularité certes, mais différence de moyens aussi. Selon Forbes, en 2017, Hero MotoCorp, constructeur de deux-roues, n’a lâché « que » 22 millions d’euros pour apposer son nom à l’ISL pendant trois ans alors que le championnat de cricket a reçu 300 millions d’euros de la marque chinoise de smartphones Vivo, pour un contrat de cinq ans.
«Au début, les clubs investissaient dans des joueurs phares, indique l’ex-Caennais Cédric Hengbart, qui a disputé trois saisons en ISL. Cela a entraîné un engouement populaire, à part, peutêtre, dans les grandes villes. A partir de la troisième année, cela s’est gâté. Beaucoup d’agents ont commencé à graviter autour de l’ISL, venant avec des joueurs moyens. Dans l’ensemble, ça a été un gros flop.» Dans le même temps, l’ISL a aussi souhaité donner plus d’importance aux joueurs locaux, pour, notamment, améliorer la sélection. « Le nombre d’étrangers par club est limité à 7, et on ne peut en aligner que 5 en même temps sur le terrain, explique l’attaquant uruguayen Federico Gallego, qui évolue à NorthEast United. A tous les matchs, un joueur indien de moins de 21 ans doit aussi être aligné. » Mais, s’il y a moins de stars, c’est aussi parce que le format de l’ISL a changé. «Ils sont passés d’une saison de 2-3 mois à une de 8-9 mois, précise Cédric Hengbart. Avec un match par semaine, tu passes ton temps à l’hôtel et tu n’as pas la possibilité de faire des activités en dehors. » Une fréquence qui a eu aussi une répercussion sur la fréquentation des stades comme à Kerala. Dans le stade de l’ancien club de Cédric Hengbart, la moyenne est passée de 48 000 à 21 000 spectateurs, en quatre ans. Pour autant, « les stades sont très grands et les gens poussent leur équipe, précise Federico Gallego. Peu à peu, une culture foot est en train de se former dans le pays. »
« Avec un match par semaine, tu passes ton temps à l’hôtel. »
Cédric Hengbart, ex-joueur de Kerala