Economie
Les débats sur la loi Pacte vont-ils se terminer un jour ? Voté en première lecture par l’Assemblée en octobre, puis retoqué par le Sénat en février, le projet de loi gigantesque sur les entreprises (plus de 200 articles) est reparti pour un nouveau tour législatif cette semaine. Jeudi, les députés l’ont à nouveau adopté (47 voix pour, 24 contre), avant de le renvoyer au Sénat, qui risque de le rejeter une nouvelle fois… Au coeur du désaccord, il y a le devenir d’Aéroports de Paris (ADP).
De beaux dividendes
ADP gère les deux plus gros aéroports français, Roissy-Charles-de-Gaulle et Orly, et affiche une capitalisation boursière de presque 17 milliards d’euros. L’Etat y est majoritaire, car la loi lui interdit pour l’instant de descendre en dessous de 50 % du capital. La nouvelle loi Pacte ferait sauter cette contrainte, ce qui ouvrirait de facto la voie à une possible privatisation. Le gouvernement veut utiliser l’argent qui en serait dégagé pour alimenter un « fonds pour l’innovation » de 10 milliards d’euros. L’autre intérêt immédiat de la privatisation, pour l’exécutif, c’est de pouvoir faire baisser la dette publique sans tailler dans les dépenses.
Fait assez rare, la droite comme la gauche critiquent la volonté du gouvernement de vendre ADP. Les socialistes s’interrogent, par exemple, sur la justification financière de l’opération. Ils notent qu’ADP permet de générer pour l’Etat « 175 millions d’euros de dividendes, en constante progression », qui « pourraient être consacrés au financement de l’innovation mais qui iront dans la poche des investisseurs privés ». Les opposants rappellent aussi la privatisation ratée de l’aéroport de Toulouse. Le groupe chinois qui en est devenu l’actionnaire principal en 2014 manquait d’expérience aéroportuaire, notamment. Lundi, le rapporteur public de la cour administrative d’appel de Paris a recommandé l’annulation de la privatisation partielle. Se voulant rassurant, le gouvernement a promis, par exemple, que l’Etat garderait la main sur les tarifs aéroportuaires, «contrairement à ce que l’on voit pour les autoroutes». Il ne parle plus non plus d’une privatisation, mais d’une concession d’ADP pour une durée de soixante-dix ans.