Comment la police recueille la parole des enfants
Enfants « 20 Minutes » a passé deux jours au sein de la brigade de protection des mineurs*. Une équipe y traite les violences intrafamiliales
Un garçonnet s’assied dans un fauteuil, change de place, choisit finalement la banquette. La conversation s’engage très vite sur le football, sa passion. Il est intarissable. La capitaine de police tente alors d’aborder l’objet de sa présence dans les locaux de la brigade de protection des mineurs (BPM) de la police judiciaire parisienne : les violences qu’il subirait chez lui. A leur seule évocation, l’enfant se referme, pique une colère, tourne le dos à la fonctionnaire, qui tente de le rassurer. Il ne dira plus un mot. «Chez les petits, le langage non verbal peut en dire long», explique le commandant divisionnaire fonctionnel Guy Bertrand, à la tête de la section intrafamiliale depuis six ans.
«Il y a un avant et un après-Outreau. »
Guy Bertrand,
Dans cette section, l’immense majorité des quelque 800 dossiers traités chaque année se déroulent dans le huis clos familial, et les deux tiers d’entre eux sont de nature sexuelle. Comment faire parler les enfants, souvent de leurs proches? Comment démêler ce qui relève de l’imaginaire ou d’une réalité sordide? Le fiasco d’Outreau – quatre enfants avaient dénoncé un vaste réseau pédophile fictif – a beau avoir une vingtaine d’années, il reste dans la tête de ces policiers spécialisés. «Il y a un avant et un après-Outreau, reconnaît Guy Bertrand. Mais cette affaire a été salutaire, elle a fait évoluer le recueil de la parole.»
Les enquêteurs savent que, jusqu’à 7 ou 8 ans, les enfants ne mentent pas délibérément. « Mais ils sont manipulables et peuvent raconter une histoire en pensant que c’est ce qu’on attend d’eux», note la capitaine Stéphanie Giorgianni, qui ne compte plus le nombre d’affaires où la parole des plus jeunes est instrumentalisée par l’un des parents dans le cadre des séparations. Les fonctionnaires doivent alors décrypter ce récit. A la BPM, les enfants sont toujours entendus seuls, dans une salle spécifique. On y trouve quatre poupées, un couple et deux enfants, dotées de parties génitales et de poils pour les adultes. Elles permettent aux enfants de «montrer» ce qu’on leur a fait subir. «C’est un outil parmi d’autres pour délier la parole», précise Stéphanie Giorgianni. Car, ici, chaque audition est une course contre la montre : impossible d’entendre les enfants plus de trente minutes. Au-delà, l’attention se perd. C’est pour cette raison qu’un second fonctionnaire, caché derrière une vitre sans tain, observe l’enfant et ses réactions, suggère parfois, via une oreillette, des questions. A partir d’une dizaine d’années, les victimes mesurent les répercussions de leurs témoignages. Et même si leurs parents se sont transformés en bourreaux, ils éprouvent un sentiment de loyauté envers eux. «Ils n’ont pas de point de comparaison», précise Guy Bertrand. Une double peine, en somme. Quatre gardes à vue après un accident mortel de manège. Quatre propriétaires et exploitants de deux manèges à la fête foraine de Firminy (Loire) ont été placés en garde à vue mardi après un accident, lundi soir, qui a coûté la vie à une jeune femme. Une seconde est grièvement blessée.
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