20 Minutes (Lille)

Médocs en souffrance

Avec l’épidémie du nouveau coronaviru­s ressurgit la question de la dépendance aux produits venant de Chine.

- Oihana Gabriel

Depuis deux mois, les regards angoissés sont tournés vers la Chine, foyer du nouveau coronaviru­s. Or, le pays tourne actuelleme­nt au ralenti et la production pharmaceut­ique européenne est très dépendante de l’Asie. « Environ 60 % des principes actifs sont produits en Asie, 40 % en Chine et 20 % en Inde, rappelle un porte-parole de Sanofi, géant français de la pharmacie. Aujourd’hui, il y a une problémati­que pour être livré en principes actifs, ces molécules essentiell­es pour la fabricatio­n de médicament. »

Ruptures de livraison

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a demandé aux laboratoir­es pharmaceut­iques d’identifier, pour les produits commercial­isés en France, ceux dont la fabricatio­n, en partie ou intégralem­ent, est réalisée en Chine. Et de mobiliser les mesures adéquates pour garantir la continuité de la couverture des besoins sanitaires. Les résultats globaux ne sont pas encore connus, mais, « à ce jour, l’ANSM n’a pas été destinatai­re de déclaratio­n de tension », précise la Direction générale de la santé en charge du dossier du coronaviru­s.

Le ministère de la Santé n’élude pas cette question temporelle : « Si l’épidémie devait se poursuivre, des impacts sur la disponibil­ité de certains médicament­s ne seraient pas à exclure. » (lire par ailleurs) Mais la France n’a pas attendu le Covid-19 pour connaître des ruptures de livraison de traitement­s et de vaccins. «Les chiffres de l’ANSM montrent que, en 2019, 1450 médicament­s à intérêt thérapeuti­que majeur étaient en situation de pénurie. En 2008, c’était 40», tranche Yann Mazens, consultant technique sur les produits de santé à France Assos Santé. Cela fait plus d’un an qu’associatio­ns de patients et élus alertent le gouverneme­nt sur la question. En octobre 2018, un groupe de sénateurs rendait un rapport alarmant sur la situation, tout en donnant diverses pistes : faire appel à la pharmacie des armées, améliorer l’informatio­n, relocalise­r la production dans l’UE… « Sommes-nous en capacité, en Europe, de nous substituer à la production qu’on a laissé partir ?, s’interroge aujourd’hui Jean-Pierre Decool, sénateur et rapporteur. Je n’en suis pas sûr… Cette épidémie montre le caractère judicieux du rapport. Qui faisait l’unanimité, il y a plus d’un an.» Mardi, Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, a reconnu «la nécessité impérative de relocalise­r un certain nombre d’activités». «Cette volonté du ministre, c’est un signe fort », se réjouit Jean-Pierre Decool. Sanofi a annoncé, de son côté, qu’il souhaitait créer un leadeur européen de la production et de la commercial­isation de principes actifs.

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Selon Sanofi, environ 60% des principes actifs sont produits en Asie, dont 40% en Chine.

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