Abstention, virus !
EXCLUSIF. Selon un sondage Ifop pour Charles.co publié par «20 Minutes», près de trois électeurs sur dix envisagent de ne pas aller voter aux municipales à cause des risques de transmission du coronavirus.
Des écoles fermées, des salariés confinés, des voyages annulés. Alors que la France n’est encore qu’au stade 2 du plan de gestion du coronavirus, la crise sanitaire mondiale inquiète dans l’Hexagone, où l’on recensait dimanche soir plus de 1 100 cas confirmés et 19 décès dus au Covid-19. Des chiffres qui font de la France le deuxième pays le plus affecté par ce virus en Europe, après l’Italie (lire ci-dessous). De quoi pousser certains Français à modifier leurs habitudes au quotidien ? Selon les résultats du sondage Ifop pour Charles.co publié en exclusivité par 20 Minutes*, plus d’un Français sur quatre (28%) pourrait bouder les urnes lors des élections municipales, dont le premier tour se tient dimanche, par peur des risques de transmission du coronavirus. Soit entre 6 et 8 millions d’électeurs. « On peut aujourd’hui considérer que nous sommes proches du pic de l’épidémie de peur liée au coronavirus, explique Jocelyn Raude, chercheur en psychologie sociale à l’Ecole des hautes études en santé publique. Une peur qui n’est d’ailleurs pas proportionnelle au nombre de personnes infectées par le virus. Très vite, ces comportements excessifs diminuent. Mais pour l’heure, il y a encore beaucoup de facteurs non connus liés au Covid-19. » Ainsi, un quart des Français (25%) a déjà évité de se rendre dans des lieux publics pour des loisirs ou des achats à cause du coronavirus, selon les résultats de notre sondage. Bars, salles de sport et restaurants asiatiques comptent parmi les lieux les plus évités.
« En psychologie, deux facteurs jouent un rôle sur le sentiment de peur, expose Jocelyn Raude. L’inconnu d’abord, qui est anxiogène. C’est notamment ce que l’on observe dans le Morbihan, où se trouve l’un des foyers épidémiques du virus et dont on ignore pour l’heure qui est le patient zéro. Le second facteur, c’est le sentiment de contrôle, qui, lui, rassure. Si on a le sentiment que l’on peut contrôler son environnement et les facteurs infectieux, alors la peur diminue, comme c’est le cas pour tous ceux qui ont fait des réserves de nourriture, de gel hydroalcoolique et de masques. »
En revanche, il semblerait que la psychose associée au coronavirus n’ait pas poussé les Français à renforcer les mesures d’hygiène conseillées par les autorités sanitaires. Ainsi, aujourd’hui, 72 % des Français se lavent les mains en sortant des toilettes, contre 71 % fin janvier, avant que le coronavirus ne fasse sa première victime en France. « Nous n’avons pas en France une culture microbiologique très développée, explique Jocelyn Raude. Beaucoup pensent que l’on attrape un rhume à cause du froid. Il n’y a pas forcément une large conscience que l’on véhicule des milliers de bactéries – dont des agents pathogènes – sur nos mains, car on est ici dans le domaine de l’invisible. Cela explique en partie pourquoi, malgré l’épidémie, beaucoup ne se lavent pas plus les mains qu’avant, se serrent la main ou se font la bise. »
«Nous sommes proches du pic de l’épidémie de peur liée au coronavirus.»
Jocelyn Raude, chercheur