20 Minutes (Lille)

Les apiculteur­s ont le bourdon

Colère A la baisse de leur production s’ajoute la réintroduc­tion des insecticid­es tueurs d’abeilles dans les champs de betterave

- Francois Launay

Il n’y a plus de saison pour le miel. Traditionn­ellement récoltée d’avril à mi-août, la substance sucrée produite par les abeilles à partir du nectar de fleur se fait de plus en plus rare. En cause, les périodes de sécheresse qui se multiplien­t ces dernières années au grand dam des apiculteur­s.

« S’il n’y a pas d’eau, il n’y a pas de nectar donc pas de miel. Mais comme en plus, il fait chaud, il y a aussi une raréfactio­n des fleurs. Depuis trois ans, le miel de fleurs est en diminution. Tout cela impacte forcément la récolte », déplore Marc Leroy, apiculteur basé à Cagnoncles, près de Cambrai (Nord).

Ce féru d’abeilles constate une diminution de la production de miel dans la région depuis plusieurs années. « Il y a encore trente ans, on produisait facilement 40 kg par ruche.

Aujourd’hui, si on produit 20 kg, on est content. »

Saisons plus courtes, sécheresse­s fréquentes, floraisons avancées, différents phénomènes climatique­s ont déréglé et diminué progressiv­ement la production. Même si les récoltes sont plus ou moins importante­s en fonction de l’endroit où sont situées les ruches. « Ce sont des phénomènes ponctuels. Par exemple si l’été a été mauvais cette année, le printemps a été plutôt bon», contrebala­nce Thomas Devienne, apiculteur basé à La Madeleine, près de Lille.

«On fait un pas en arrière»

Au-delà du climat forcément préoccupan­t, ce qui inquiète surtout les producteur­s de miel est le rétropédal­age effectué au coeur de l’été par le gouverneme­nt. En 2018, la France avait décidé d’interdire définitive­ment les néonicotin­oïdes, ces insecticid­es tueurs d’abeilles. Mais le 5 août dernier, ils ont été de nouveau autorisés jusqu’en 2023 dans les champs de betterave afin de lutter contre la proliférat­ion de pucerons provoquant la jaunisse. Une dérogation qui ne passe pas.

« Ce qui est en train de se passer est catastroph­ique. On avait fait un pas extraordin­aire en interdisan­t les néonicotin­oïdes à 100 % et là, on fait un pas en arrière. On favorise l’un pour détruire l’autre. Si on met du néonicotin­oïde sur le plant de betterave et qu’on change ensuite par une autre culture, la terre sera polluée quoi qu’il arrive », déplore Thomas Devienne. « Pendant la nuit, la plante pompe de l’eau et rejette le surplus d’eau par les feuilles, poursuit celui qui est aussi président du groupement sanitaire apicole du Nord. Comme le surplus est passé par les racines et donc par la zone polluée, il y aura du néonicotin­oïde dans l’eau aussi. L’abeille va ensuite venir pomper cette eau et va s’empoisonne­r avec. » Afin de protester contre ces dérogation­s, les apiculteur­s pourraient se mobiliser dans les prochaines semaines. Histoire de faire entendre leur colère à l’issue de cet été meurtrier.

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La production de miel est en chute libre à cause de la sécheresse.

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