20 Minutes (Lille)

«On nous menace à demi-mot»

Télétravai­l Dans les Hauts-de-France, beaucoup de salariés se plaignent d’employeurs qui ne jouent pas le jeu du travail à distance

- François Launay

Depuis le reconfinem­ent, le télétravai­l doit être appliqué partout où c’est possible. Elisabeth Borne, ministre en charge du travail, l’a déclaré jeudi : « Le télétravai­l n’est pas une option. » Sauf que beaucoup d’entreprise­s ne jouent pas le jeu comme le racontent des salariés interrogés par 20 Minutes. Secrétaire dans un cabinet d’avocats de la métropole lilloise, Laurence* doit continuer de se rendre au bureau. «Comme les tribunaux sont ouverts, nos employeurs ne nous mettent pas en télétravai­l. Alors que notre travail peut être fait à 100 % à distance, raconte cette salariée très en colère. Par contre, les grands chefs sont absents pour télétravai­l. On nous menace à demi-mot de ne pas nous payer à 100 % si on demande du télétravai­l et que forcément ça se paiera. Dans ces conditions nous fermons poliment notre gueule ! »

Emilie travaille dans une boîte de recrutemen­t de la région lilloise. Son patron lui a demandé de venir quatre fois par semaine au bureau et de rester en télétravai­l une journée. Trop peu pour la salariée, inquiète pour sa santé. « J’ai dit à mon employeur que j’avais la trouille de retourner dans les locaux, explique-t-elle. Il m’a alors demandé de venir deux jours par semaine. J’ai voulu négocier pour un seul, mais il n’a pas voulu. Il veut une cohésion d’équipe et estime que les visios ne suffisent pas à faire que l’équipe soit soudée.»

«Une recommanda­tion forte»

Dans d’autres entreprise­s régionales, si l’on n’impose pas de venir au bureau, le télétravai­l n’est pas non plus encouragé. Exemple avec Philippe, employé dans une société de 100 salariés. « Alors que 80% des salariés peuvent effectuer leurs tâches à distance, on nous a juste demandés si l’on voulait être en télétravai­l ou venir sur site. Résultat, environ 20 % ont accepté le travail à distance», regrette le salarié. Même son de cloche dans cette grande entreprise du tertiaire, basée à Lille, où chacun fait un peu comme il veut ou presque. « J’aimerais bien faire du télétravai­l à 100 %, mais on me fait comprendre que ce serait quand même bien que je vienne au boulot une fois par semaine», raconte Patrick. Le télétravai­l est donc loin d’être appliqué là où c’est possible. Ce qui ne semble pas trop déranger le Medef régional par la voix de son président

Patrice Pennel : « Je trouve que la ministre du Travail a eu une phrase un peu excessive en disant que le télétravai­l n’était pas une option. La seule solution est de laisser le choix aux chefs d’entreprise. La seule réalité aujourd’hui, c’est que l’économie doit continuer de tourner. » La loi joue pour les chefs d’entreprise qui n’ont pas l’obligation légale de mettre leurs salariés en télétravai­l, même en période de confinemen­t. « C’est juste une recommanda­tion forte faite aux employeurs, reconnaît-on du côté de l’inspection du travail de Lille. Mais, a priori, il n’y a pas de sanctions pour ceux qui refusent de le faire. »

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Depuis le reconfinem­ent, le télétravai­l doit être appliqué là où c’est possible.

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