Un «réfugié climatique» en France
Est-ce le premier jugement d’une cour administrative d’appel à consacrer le statut de « réfugié climatique » ? « Oui, car je n’ai pas connaissance d’une autre affaire où la justice aurait considéré que renvoyer une personne qui souffre de problèmes respiratoires dans un des pays les plus pollués au monde l’exposerait à un risque d’aggravation de sa maladie », savoure l’avocat toulousain Ludovic Rivière. Arrivé en France en 2011 pour fuir des persécutions, Sheel*, 40 ans, originaire du Bangladesh, est aujourd’hui installé à Toulouse (Haute-Garonne). Depuis 2015, il détient un titre de séjour temporaire en qualité d’étranger malade. Il souffre d’un asthme allergique aux acariens et d’un syndrome d’apnée du sommeil sévère.
Prise en charge impossible
Le 18 juin 2019, la préfecture de HauteGaronne lui a adressé une obligation de quitter le territoire français. Pour l’administration, « il peut bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine ». Pour son avocat, « la prise en charge dans son pays d’origine n’est pas possible ».
Le 15 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’obligation de quitter le territoire, sans brandir l’argument de la pollution atmosphérique comme critère dangereux. En revanche, le 18 décembre, la cour administrative d’appel de Bordeaux a été catégorique : renvoyer Sheel dans son pays d’origine engendrerait «une aggravation de sa pathologie respiratoire». Autrement dit, la justice a fait intervenir le critère climatique pour apprécier l’état de risque sanitaire d’un étranger malade. Une première.