Les politiques divisés sur la suspension du compte de Trump
Internet L’éviction de Donald Trump de Twitter obligera les géants du Net à collaborer avec les pouvoirs publics, espèrent des politiques
La décision est historique. Twitter a suspendu « de façon permanente » le compte de Donald Trump, vendredi, deux jours après l’invasion du Capitole par certains de ses partisans. Le réseau social a justifié cette éviction par le « risque de nouvelles incitations à la violence » de la part du président des Etats-Unis aux 88 millions d’abonnés. Les profils du locataire de la MaisonBlanche, dont le mandat se termine le 20 janvier, ont également été suspendus sur d’autres plateformes comme Facebook, Instagram, Snapchat ou Twitch. En France, ce bannissement relance le débat sur la puissance et la régulation des géants du Net. L’Elysée se refuse à tout commentaire, mais le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, s’est dit lundi « mal à l’aise » face à la suppression du compte Twitter de Donald Trump : « Bannir une personne, c’està-dire la réduire au silence sur les réseaux sociaux, qui sont devenus une forme d’espace public, me semble compliqué, en l’absence de critères spécifiquement établis. » « La régulation des géants du numérique ne doit pas se faire par l’oligarchie numérique elle-même, a également dénoncé sur France Inter le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire. Elle est nécessaire, mais elle doit se faire par les Etats et par la justice. »
On retrouve ces critiques sur l’hégémonie des géants du numérique dans l’opposition. « Que les Gafa se permettent de couper le sifflet d’un président élu montre la pente inquiétante du pouvoir pris par ces plateformes », assure le député Sébastien
Chenu (RN). « La régulation ne peut pas être laissée au libre arbitre d’une entreprise privée, à des règles arbitraires », pointe le député Alexis Corbière (LFI).
D’autant que la purge de Twitter ne s’est pas arrêtée à Donald Trump. La plateforme a annoncé lundi avoir supprimé 70000 comptes qu’elle estime affiliés à QAnon, une mouvance conspirationniste pro-Trump, invoquant les mêmes justifications. «Ils ont mis le doigt dans quelque chose dont ils ne savent plus sortir, a réagi sur Radio Classique Cédric O, secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques.
On doit reposer un certain nombre de règles, et il n’y a que la puissance publique qui peut le faire. » Malgré ce bannissement de Donald Trump, les géants du numérique se montrent toujours aussi frileux à collaborer avec les pouvoirs publics en matière de modération : « Malheureusement, les plateformes n’ont pas encore pris ce chemin, reconnaît le député Mounir Mahjoubi (LREM). Mais le politique garde la main. Ce qui s’est passé avec Trump va accélérer l’agenda en Europe et aux Etats-Unis, car plus aucun pays ne va accepter que ça se reproduise. »
«La régulation ne peut pas être laissée au libre arbitre d’une entreprise privée.»
Alexis Corbière, député LFI