Environnement
Dans le Nord, la lutte s’organise contre les plantes exotiques
« L’invasion des profanateurs de biodiversité » : ce pourrait être le titre d’un film racontant comment, depuis plusieurs décennies, des plantes exotiques se propagent dans la nature, provoquant parfois l’extinction d’espèces rares. Mais ce scénario n’a rien d’une fiction. Il s’agit d’un constat dressé par le conservatoire botanique de Bailleul, dans le Nord, depuis une dizaine d’années, au travers d’un guide de sensibilisation destiné au grand public*. La troisième édition vient de paraître avec une conclusion inquiétante : les espèces exotiques invasives sont de plus en plus nombreuses. Il y a six ans, 14 espèces animales et 29 espèces végétales étaient répertoriées. Elles sont aujourd’hui respectivement 42 et 40. On connaît à peu près les dégâts que causent la faune exotique : frelons asiatiques, écrevisses américaines, tortues de Floride ou encore perruches à collier. Mais le fléau que constitue la flore venue d’ailleurs reste souvent ignoré.
La première menace concerne la biodiversité. « Au lieu de venir localement l’enrichir, ces plantes forment des peuplements denses d’une seule espèce et les autres périclitent, décrit Benoît Delangue, chargé de missions scientifiques au conservatoire. Elles proviennent de l’autre bout du monde et n’amènent pas avec elles les organismes qui régulent leur développement. »
S’en débarrasser coûte cher
La renouée du Japon, qui se développe au bord des routes, notamment sur le périphérique de Lille, peut gêner la visibilité des automobilistes avec sa taille pouvant dépasser les 2 m.
La berce du Caucase peut, elle, provoquer lésions et brûlures si on entre en contact avec la sève. En 2020, un groupe d’experts scientifiques et techniques a été mis en place pour gérer ces plantes envahissantes. « L’éradication est bien souvent impossible pour ces espèces qui prolifèrent très vite », explique Benoît Delangue. Et s’en débarrasser peut coûter cher. Sur le canal de la Somme, les autorités doivent débourser chaque année environ 200 000 € pour dégager les voies de navigation entravées par une plante aquatique au nom barbare. Quelles autres solutions ? « Agir en amont et interdire la vente de certaines espèces, indique Benoît Delangue. Une réglementation est mise en oeuvre depuis quelques années, mais la multiplication des échanges commerciaux mondiaux favorise l’extension des plantes qui voyagent avec les marchandises. »
* « Plantes exotiques envahissantes des Hauts-de-France », gratuit (sauf frais d’envoi par La Poste). Version PDF sur le site Web du conservatoire botanique de Bailleul.