Le créateur du site des DéQodeurs livre ses vérités
QAnon et la France Léonard Sojli, créateur des DéQodeurs, à la croisée des tendances conspirationnistes, s’est confié à «20 Minutes»
A 37 ans, Léonard Sojli est l’administrateur des DéQodeurs, l’un des plus influents sites complotistes de la mouvance QAnon en France. Souriant, crâne dégarni et barbe de trois jours, il choisit ses mots avec soin et roule légèrement les «r». Cet Albanais à l’allure de hippie, qui vit entre la France et la Suisse, se consacre à son site Internet du « lundi au dimanche, de 10 h à 2 h du matin», et vit des 3000 € mensuels, «parfois plus», que lui verse sa communauté. Depuis son domicile, à Orléans (Loiret), il se confie à 20 Minutes.
Après le lancement de deux sites Web complotistes avant l’heure au début des années 2010, Léonard Sojli fait une pause lorsque Emmanuel Macron entre à l’Elysée. C’est en mars 2020 que la flamme renaît alors que la France se confine pour limiter la propagation du Covid-19, il découvre la parole de «Q», un anonyme qui prétend être un haut gradé de l’armée américaine et invite ses adeptes à combattre l’entité maléfique que représenterait l’«Etat profond». «Je suis devenu boulimique de ses messages, se souvient Léonard Sojli. Il parlait d’un pouvoir obscur qui oeuvre au-dessus du pouvoir étatique, des banques centrales, des institutions corrompues. »
En quelques mois, sa plateforme, devenue Les DéQodeurs, attire des milliers de visiteurs. Lors de ses lives, diffusés sur divers canaux, il revendique entre 50 000 et 70 000 spectateurs réguliers. Si Q reste la pierre angulaire de leur chaîne, Les DéQodeurs sont un syncrétisme de plusieurs tendances complotistes. Auprès de sa communauté, Léonard Sojli et ses affidés, Rudy et Pépito, font feu de tout bois. Une photo de Bruno Le Maire sans son masque ? « C’est la preuve que le virus ne leur fait pas peur et qu’ils veulent nous contrôler.»
Tristan Mendès France, spécialiste du complotisme et maître de conférences associé à l’Université de Paris, pointe leurs contradictions : «Ils se disent apolitiques, mais font l’éloge de la politique ultranationaliste de Trump et de régimes autocratiques comme celui de Vladimir
Poutine. Ils se disent humanistes et hermétiques à l’antisémitisme, mais font la promotion de théories qui s’inscrivent dans une culture antisémite.» «Je ne suis ni raciste, ni antisémite, ni xénophobe», oppose Léonard Sojli. Pour Pascale Duval, porte-parole de l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu victimes de secte, les dérives sectaires au sein de ces groupes ne font aucun doute : «Une communauté se crée autour d’une personnalité profondément religieuse, qui impose, souvent sans l’admettre, sa vision de la société à ses adeptes, pour qui son discours devient une forme de vérité absolue. »
Lors de ses lives, il revendique entre 50000 et 70000 spectateurs réguliers.