Lelandais « fragile et dangereux», selon les experts psy
Justice Les experts psychiatres et psychologues qui ont examiné Nordahl Lelandais ont défilé lundi à la cour d’assises de la Savoie
Qu’ont pu retenir les jurés après avoir écouté, durant huit heures, les psychiatres et psychologues qui ont défilé à la barre? Ces experts, qui ont examiné au cours de l’instruction Nordahl Lelandais, ont livré lundi à la cour d’assises de la Savoie leurs conclusions dans un jargon qui se soucie peu des non-initiés. Tour à tour, ils ont dessiné le portrait d’un accusé obsédé par son image, aussi dangereux que fragile. Hélène Dubost a rencontré l’ancien militaire, jugé pour le meurtre d’Arthur Noyer en avril 2017, à trois reprises. Cette psychologue clinicienne se souvient qu’il était « extrêmement distant et froid » et qu’il « ne s’exprimait pas de façon spontanée » : «Nordahl Lelandais se livre difficilement. Il distribue des pièces de puzzle, mais pas toutes les pièces, et il demande à l’autre de reconstituer.» Après plusieurs semaines à démentir son implication, il a fini par reconnaître devant elle avoir tué le jeune caporal de 23 ans. Mais il s’est présenté comme la « victime » d’Arthur Noyer, qui l’aurait agressé. Elle se souvient néanmoins qu’il avait lâché cette phrase troublante : « Il s’est bien défendu. »
De son côté, le psychiatre François Danet remarque que l’accusé tient «des propos lisses quand on commence à entrer dans des questionnements sur la vie affective ». Et pour cause. « S’il s’ouvre, il risque de s’effondrer » et même de se suicider. « S’il se ferme, il peut maintenir un certain état de bien-être.» Vulnérable donc, mais aussi très dangereux. « Sa dangerosité n’est pas psychiatrique, elle est criminologique, précise François Danet. Mais il dit très peu de choses concernant ses motivations conscientes et inconscientes. On ne sait pas s’il y a chez lui des motivations sexuelles ou non sexuelles. »
« Sa dangerosité est importante », assure le psychiatre Patrick Blachère, qui a rencontré Nordahl Lelandais deux fois. « Son vrai problème, c’est qu’il se met tout le temps à l’abri de la culpabilité et de la honte», remarque l’expert, qui décrit un « homme intelligent» souffrant d’un «trouble grave de la personnalité », « dominé par l’instabilité et l’impulsivité ». « La psychiatrie, est-ce que c’est une science?», lui demande, énervé, l’avocat de l’accusé, Alain Jakubowicz. « Je ne répondrai pas à cette question », lui répond le psychiatre, précisant qu’il est « d’abord médecin ». L’avocate générale prononcera ce mardi son réquisitoire. Suivront les plaidoiries de la partie civile et de la défense. Le verdict devrait être rendu mercredi.
« S’il s’ouvre, il risque de s’effondrer. »
François Danet, psychiatre